Les plantes dépolluent les eaux usées industrielles

Basée près de Vannes, l’entreprise Svitec mise sur les plantes pour dépolluer les eaux usées industrielles. Transporteurs, abatteurs ou brasseurs font appel aux jardiniers chimistes pour répondre à leur problématique environnementale.

16720.hr - Illustration Les plantes dépolluent les eaux usées industrielles
L’absence de rejet dispense de tout raccordement du système à l’assainissement collectif et permet d’éviter une démarche réglementaire de raccordement, devenue contraignante et coûteuse.

Les transports Orain, de Saint-Jacques-de-la-Lande (35), ont été parmi les premiers à faire appel à Svitec Solutions vertes. C’était en 2015, quelques mois après la création de l’entreprise morbihannaise. « Nous avons prélevé des échantillons d’eaux usées, issues du lavage des camions, et réalisé des essais avec des plantes, en laboratoire », indique Véronique Texier, sa directrice. L’objectif était de détecter celles qui fixent le mieux les métaux indésirables que sont le cuivre, le zinc, le chrome et le cadmium, sans oublier les hydrocarbures. Deux ans plus tard, le transporteur mettait sa station de traitement en service, financée partiellement par l’Agence de l’eau Loire-Bretagne, convaincue de l’efficacité du procédé, analyses d’eau à l’appui. Les épaisses couches de graisses des sellettes d’attelage des semi-remorques et autres huiles usagées trépassent désormais sous l’action racinaire de plantes aux noms secrètement gardés. « Ce sont des plantes hélophytes rustiques », lâche l’hydrogéologue de formation. Des plantes qui vivent les pieds dans l’eau. 

Transformer un cercle infernal en démarche positive

Décomposés par les plantes

Les eaux de la station de lavage sont récupérées dans une cuve de réception, filtrées dans un lit planté de roseaux puis collectées dans un bassin où des radeaux végétalisés font leur œuvre. L’eau purifiée est pompée et ressert au lavage des camions, en circuit fermé. « Les polluants sont chimiquement décomposés par les plantes (évacués dans l’air sous forme de composés volatils non toxiques ou utilisés comme nutriments). Ils peuvent aussi être stockés dans le végétal ». Dans ce cas, racines et feuilles, qui concentrent les métaux, sont broyées puis traitées thermiquement. La cendre résiduelle est utilisée dans l’industrie chimique. Le système a été dupliqué et vendu à d’autres transporteurs pour répondre à la problématique du lavage à l’eau potable. « Une fois installées, les stations sont suivies en réalisant des analyses d’eau régulièrement, en entretenant les plantes et le réseau », poursuit l’ancienne spécialiste de la gestion des eaux pluviales en milieu urbain. 

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Les radeaux végétalisés.

Recycler les eaux d’élevage de canards

Svitec Solutions vertes propose, depuis peu, ses services à l’industrie agroalimentaire. « Nous avons fait des essais pendant trois mois et avons mis au point un traitement des déchets de microbrasseries, enrichis en levures, contre lesquelles il y a peu de traitements ». 

Les éleveurs de canards sont également demandeurs de solutions pour recycler les eaux de baignade des canetons en croissance. « Nous y travaillons depuis 6 mois. Les analyses d’eau traitée selon notre méthode montrent un abattement de l’azote et du phosphore important. Le groupement songe désormais à intégrer notre concept dès la construction de nouveaux bâtiments d’élevage afin de réutiliser l’eau en circuit fermé. Nous travaillons également avec un abattoir sur cette même problématique de recyclage ». 

L’entreprise de dépollution a également développé des partenariats avec des entreprises de travaux publics et agricoles ; celle de Messac (35) notamment. 

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Véronique Texier, devant une réalisation chez AVB Autocars à Noyalo (56).

Bientôt le béton

Elle collabore actuellement avec un fabricant de béton de Vannes. « Les eaux alcalines issues du lavage des différents outils sont orientées vers le réseau d’assainissement. Nous avons développé un traitement naturel pour neutraliser ces eaux, les débarrasser des métaux grâce aux plantes. L’objectif est de les réutiliser pour fabriquer du béton. Le procédé est au point et sera commercialisé au second semestre de l’an prochain ». Le marché de la décontamination et du recyclage de l’eau par des procédés naturels est encore embryonnaire. Les besoins sont énormes, beaucoup de sites industriels génèrent des déchets chargés en hydrocarbures, en métaux lourds ou en solvants qu’il faut traiter, avec un coût économique le plus faible possible.

Des objectifs ambitieux dans des pays étrangers

La réutilisation des eaux usées est un enjeu politique et socio-économique pour le développement futur des services d’eau potable et d’assainissement à l’échelle mondiale. Elle présente l’avantage majeur d’assurer une ressource alternative permettant de mieux préserver les ressources naturelles et de pallier les pénuries d’eau engendrées par les changements climatiques.
Australie, Californie, Chypre, Espagne, Floride, Israël… Certains pays, états et grandes métropoles ont des objectifs ambitieux de satisfaire de 10 à 30 %, voire jusqu’au 60 % de leur demande en eau par la réutilisation des eaux usées épurées. L’irrigation agricole est le plus grand consommateur d’eau recyclée. 


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