Le lin à la reconquête des terres bretonnes

Le projet de création d’une usine de teillage du lin sur le secteur de Landivisiau s’accompagne d’un besoin rapide de développement de la culture en Bretagne. La société Bretagne Lin organise des réunions sur le territoire pour expliquer les spécificités de cette culture.

17865.hr - Illustration Le lin à la reconquête des terres bretonnes
Après l’arrachage vient la période du rouissage qui s’étale de juillet à septembre. La pectose qui soude les fibres textiles à la partie ligneuse de la plante sera ainsi éliminée.

« Comme dans le cochon tout est bon, j’aime dire que dans le lin tout est bien », introduit Dominique Le Nan, fondateur de Bretagne Lin, lors d’une réunion d’information, organisée mi-septembre à Saint-Étienne-du-Gué-de-l’Isle (22). Il rappelle que la France est le premier producteur de lin au monde avec plus de 80 % de la production, ce qui représente 141 400 ha sur l’ensemble de l’Hexagone. « Les 5 000 liniculteurs français produisent chaque année 200 000 t de fibre de lin dont la grande majorité est exportée. Les principaux producteurs se trouvent en Normandie, Picardie et en Île-de-France. » La culture a déserté notre région, pourtant le lin fait partie de l’histoire bretonne. « Une industrie rurale de valorisation du lin s’est mise en place sur le territoire breton à partir du XVIe siècle. Les terres limoneuses du nord de la Bretagne, soumises au climat océanique sont propices à la culture du lin », indique Dominique Le Nan.

Transformer 4 000 ha de lin en fibre textile

Bretagne Lin a relancé la culture avec l’implantation de 22 ha de lin en 2022 sur le secteur de Landivisiau. « Dès 2023, la surface bretonne est passée à 193 ha. Le projet est de créer une usine de teillage du lin sur le secteur de Landivisiau dès 2024. L’objectif est d’avoir 2 lignes de teillage. Chaque ligne peut transformer l’équivalent de 2 000 ha de culture en fibre textile. Le potentiel de développement est donc d’atteindre les 4 000 ha de lin en Bretagne dans les années qui viennent. Il est important d’avoir l’outil industriel en Bretagne et nos centres de décision sur la région », lance Dominique Le Nan. La demande mondiale en fibre de lin est en constante progression. « Les vêtements en lin sont à la mode dans les pays occidentaux ainsi qu’en Asie. Les consommateurs sont en attente de produits naturels et porteurs de sens. Les atouts du lin sont nombreux : fibre végétale naturelle, production renouvelable, culture faiblement consommatrice d’intrants et d’eau… »

Une culture qui va se plaire en Bretagne

Le lin a besoin d’un climat tempéré, humide et d’une température moyenne en été comprise 18 et 25 °C pour exprimer son potentiel. Il faut idéalement 700 mm de précipitations bien répartis sur l’ensemble du cycle végétatif. L’implantation de la culture se fait prioritairement dans des terres profondes avec de bonnes réserves hydriques. Le lin est implanté en rotation tous les 6 à 7 ans. C’est une plante à croissance rapide qui atteint sa taille maximale en 100 jours. La culture est peu gourmande en azote et ne demande globalement qu’un désherbage et un fongicide. « Le lin se sème entre le 15 mars et le 15 avril avec un semoir à céréales traditionnel avec un écartement de 12,5 à 15 cm. Le semis doit être peu profond, rappuyé avec un objectif de 2 000 graines/m2. » La culture va fleurir en juin, l’arrachage se fait avec une machine spécifique en juillet, environ 5 semaines après la floraison. Vient ensuite la première phase naturelle de transformation de la plante en fibre, c’est l’alternance de pluie et de soleil qui permet au lin de rouir. « Grâce à l’action des micro-organismes et des bactéries présents sur le sol, le rouissage qui s’étale de juillet à septembre élimine la pectose qui soude les fibres textiles à la partie ligneuse de la plante. Sur cette période les andains sont retournés pour obtenir un résultat homogène. Le rouissage est la dissociation des parties fibreuses de la plante en éliminant la pectose qui soude les fibres à la partie ligneuse sous l’action enzymatique des micro-organismes du sol. » L’objectif de cette dégradation est de faciliter l’extraction des fibres. Lorsque le taux d’humidité arrive à 15 %, la paille de lin est pressée avant d’être stockée sous hangar en attendant de rejoindre l’usine pour le teillage. Les débouchés du lin sont multiples, les filasses (fibres longues) ce qui est le plus recherché servent pour le textile, les étoupes (fibres courtes) vont à la papeterie, pour des matériaux composites ou de l’isolant. Les anas de lin sont utilisés en paillage, panneaux de particules. Les graines sont transformées en huile, tourteau ou semence. Enfin, les poussières entrent dans la fabrication de certains terreaux. Dans le Finistère, la Cuma Breizh Lin a été créée pour investir dans le matériel spécifique à la culture du lin : arracheuse automotrice, retourneuse d’andains automotrice et un automoteur pour botteler. 

Une marge brute annoncée à 2 200 €/ha

Les marges brutes à l’hectare sont supérieures aux productions classiques. Dominique Le Nan annonce une moyenne sur 5 ans de 2 200 €/ ha de marge brute pour du lin textile. C’est le rendement en paille et le pourcentage de fibre longue qui vont être déterminants pour dégager une bonne marge. En 2022, les 22 ha récoltés sur Landivisiau ont donné 8 t/ha de paille avec 1,5 t/ha de fibre longue quand la moyenne française était à 5,3 t/ha de paille pour 1,1 t/ha de fibre longue. « Actuellement la production bretonne est expédiée dans une usine du nord de la France. Une fois l’outil industriel monté en Bretagne, les marges devraient être encore meilleures car il n’y aura plus ce coût de transport. De plus le lin cultivé en Bretagne est de très bonne qualité avec une fibre d’une belle couleur et d’une très bonne souplesse. » 


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