Le monde magique des champignons

Avant la prochaine exposition mycologique des Côtes d’Armor, rencontres avec deux passionnés de champignons.

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Jean-Claude Lasbleiz et Sylvie Le Goff, déterminateurs de la Société mycologique des Côtes d’Armor (SMCA).

Née de l’élan d’un groupe de randonneurs, la Société mycologique des Côtes d’Armor (SMCA) s’est structurée en association en 2002. Elle rassemble aujourd’hui une bonne centaine d’adhérents. Les plus assidus se retrouvent à la saison des champignons – généralement d’août à décembre – pour des sorties du dimanche matin accompagnés d’un déterminateur et d’un guide connaissant le secteur. « Pendant une grosse heure, chacun se balade et ramasse les espèces rencontrées. Ensuite, tout est étalé sur une table. Le déterminateur passe alors à l’identification, explique les caractères importants pour apprendre à reconnaître les différents genres ou familles », explique Jean-Claude Lasbleiz, agriculteur à Landebaëron (22) et membre actif de la SMCA.

À chaque fois, le rendez-vous a lieu dans un endroit différent pour balayer l’ensemble du territoire du département. « Nous essayons également d’explorer des environnements variés : des milieux fermés comme des forêts ou ouverts comme des prairies, des zones humides, les bords de côte jusque dans les dunes… »

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Leratiomyces squamosus.

L’inventaire du monde fongique

Souvent, les gens se rapprochent de l’association par « intérêt culinaire ». Ils veulent apprendre à reconnaître les champignons comestibles et espèrent connaître « les bons spots » pour la cueillette, sourit le Costarmoricain. « Mais en fait, nous mentionnons rarement la comestibilité des champignons. Notre priorité est de transmettre la manière de bien les observer et d’informer sur la toxicité des espèces le cas échéant. » Finalement, les participants les plus mordus deviennent peu à peu des « naturalistes » plus que des cueilleurs « même s’ils élargissent bien sûr leurs connaissances sur les comestibles ». L’objectif principal de la SMCA reste l’inventaire du monde fongique des Côtes d’Armor. « Actuellement, on se rapproche des 2 000 espèces répertoriées dans le département. Notre travail permet de nourrir la base de données nationale FongiBase et de suivre localement l’évolution des espèces : certaines progressent, d’autres semblent se raréfier… », reprend Sylvie Le Goff qui a rejoint le mouvement un peu par hasard il y a deux ans. « Tombée dans la marmite » du monde magique des champignons, la jeune retraitée s’est vite mise à étudier et a obtenu un diplôme universitaire de mycologie. 

Un champignon, des kilomètres de mycélium

« En réalité, le champignon est essentiellement constitué de mycélium et se trouve sous terre. La partie aérienne que l’on cueille – que l’on devrait plutôt appeler carpophore ou sporophore – n’est que la fructification du mycélium, un peu comme la pomme dans l’arbre », explique la passionnée. « On ne se rend pas compte de la place et du rôle des champignons. » 

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Recueil de la sporée pour observation au microscope.

Un carpophore peut ainsi être relié à des milliers de mètres de mycélium quasi invisible. Et Jean-Claude Lasbleiz de poursuivre en précisant que 80 % des arbres sont « mycorhizés », c’est-à-dire engagés dans une association symbiotique avec un champignon. « Cette relation étroite est très efficace pour apporter de l’azote, du phosphore et capter de l’eau… Les arbres mycorhizés devraient ainsi mieux résister aux sécheresses. » Certaines espèces de champignons sont d’ailleurs inféodées à des arbres : « Le lactaire à lait brûlant pousse sous les noisetiers, le bolet rude uniquement sous les bouleaux… »    

Mycologie de terrain et confirmation au microscope

La mycologie de terrain, « c’est-à-dire l’identification macroscopique », n’est qu’une première étape passant par l’observation visuelle. Mais pas seulement ! « Odeurs de rave, de farine, de compote de pomme, d’anis, de cuir, d’urine de souris, d’Arpic… Il faut les sentir pour s’en rendre compte, les champignons ont des odeurs différentes. Et c’est un caractère important pour déterminer une espèce… » 

Sentir et goûter pour déterminer une espèce de champignon.

Et ce n’est pas tout. « Âcre, amer, doux, piquant, farineux, coriace, mou… Pour les identifier, tous les champignons se goûtent aussi – même les toxiques – avant d’être recrachés. » 

Ensuite, de retour à la maison, la confirmation se fait au microscope après avoir obtenu et observé « la sporée » (dépôt de spores obtenu en laissant reposer le chapeau du champignon sur une feuille) dont la couleur très variable peut être caractéristique d’une famille particulière. 

Exposition mycologique des Côtes d’Armor

Dimanche 22  octobre, de 9 h 30 à 18 h 30, à la salle polyvalente de Tréglamus (22), la SMCA organise son exposition mycologique (entrée : 3 € / adulte). Le parcours panoramique permettra d’observer plus de 300 espèces de champignons ramassés les deux jours précédents en Côtes d’Armor. Des mycologues avertis seront disponibles pour expliquer autour du stand « Aide à la détermination » pour s’initier à la reconnaissance ou identifier les champignons apportés par les visiteurs, du stand « Confusions » pour éviter les principales erreurs, du stand « Odeurs » ou du stand « Librairie » pour trouver des ouvrages de références ou adhérer à l’association… Deux nouveaux espaces seront à découvrir : l’un sur les champignons « carbonicoles », l’autre animé par le chercheur Marcel Koken du CNRS sur la bioluminescence de certains champignons et ses futures applications. Des animations sont prévues pour les enfants. 

À la salle Ty Cocagne, à 10 h 30 et 15 h, conférence « Rôle et diversité des champignons après des incendies » du mycologue Michel Hairaud sur les champignons carbonicoles. Places limitées, inscription.  


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