Le passage de la tempête Ciaran, durant la nuit du 1er au 2 novembre, a fait des dégâts dans les Côtes d’Armor. Notamment dans les exploitations de l’ouest du département, du Kreiz Breizh au sud jusqu’à la zone légumière au nord. « Vers minuit, le courant a été coupé. Six jours plus tard, il n’est toujours pas rétabli », témoigne François Boillet, producteur de lait à Plouguernével. Sur cet élevage de 130 vaches, le quotidien est chamboulé sans l’électricité qui permet de faire tourner la salle de traite, le tank, les racleurs, les pompes à eau… « La génératrice actionnée par le tracteur tourne 20 heures par jour. Nous avons déjà consommé deux pleins de carburant, soit plus de 700 L. » Heureusement, la collecte du lait n’a pas été interrompue.
Les Limousines ne voulaient plus rentrer dans le bâtiment
Au Gaec, les bâtiments sont récents et entretenus. Ils ont bien tenu le choc. « Avant la tempête, nous avions revissé des tôles, bloqué les portails exposés… » Par précaution, François Boillet qui habite à 6 km du siège de l’exploitation était rentré en télescospique à la maison. « Le matin, je suis parti à 5 h du matin et j’ai mis près d’une heure à regagner la ferme. Il y avait des arbres partout à déblayer. » Arrivé sur place, par chance, l’éleveur n’a constaté qu’un peu de casse en toiture due à des branches ou d’autres projectiles tombés. « Selon l’exposition, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Le vent a frappé davantage les bâtiments sur les buttes que ceux en fond de vallée. »
15 000 œufs perdus en quatre jours
Un peu plus au nord, à Plourac’h à la frontière du Finistère, Mathieu Lozac’h raconte l’impact de Ciaran chez lui. « Déjà six jours sans électricité. » En plus de sa génératrice, rapidement, il est allé en chercher une autre à Paimpol en tracteur et son oncle a fait quatre heures de route pour ramener un groupe électrogène de Vannes. « Sans électricité, les nids des pondeuses ne se sont pas ouverts. Résultat : les poules se sont retenues de pondre, les œufs étaient de mauvaise qualité, cassants… La perte a été de 15 000 œufs en quatre jours. » Aujourd’hui, il estime qu’il manque encore 1 000 œufs par jour pour son élevage de 20 000 pondeuses. Du côté de son cheptel allaitant, les choses n’ont pas été simples non plus. « Des pignons de bâtiment sont tombés. Aucun animal n’a été blessé mais tout le troupeau s’est échappé. » Le vice-président de la FDSEA a mis quatre jours à récupérer ses 90 Limousines. « Elles avaient peur des bâtiments et ne voulaient plus rentrer. » Suite aux dégâts, le cheptel est pour le moment tassé par manque de place. « J’essaie de boucher les trous avec des bottes pour retrouver des bouts d’étable… »
Reloger les vaches
Chez un voisin producteur de lait, la situation est encore bien pire : « Les pignons, la toiture… Toute la stabulation est par terre. Il ne reste que les poteaux de l’enceinte ! Là non plus, aucun animal blessé. Il faut trouver une solution pour reloger les vaches. » Dans ce secteur très boisé, les dégâts sont considérables et il faut prendre son mal en patience. Les équipes d’Enedis, même renforcées, ne voient pas le bout du tunnel. « Pignons, bardages, fibros, panneaux photovoltaïques… Dans le coin tout le monde a eu des dégâts », termine Mathieu Lozac’h.
260 veaux évacués
Christelle Ribourdouille conduit un élevage de 600 places de veaux à Plémet. Dans son secteur, la tempête Ciaran a fait moins de dégâts qu’à l’ouest du département. Mais elle a subi une « mini-tornade » localisée. « En arrivant le matin, j’ai découvert que le toit d’un de mes deux bâtiments a été totalement soulevé. Il y avait des plaques d’isolant dans les cases. Une catastrophe ! » Heureusement, il y avait aucun animal blessé et de l’électricité : « Mes veaux n’avaient que 10 jours d’étable. À cet âge-là, ils ne boivent que du lait. La priorité était de leur donner la buvée. » Dans cette galère, l’éleveuse a apprécié la réactivité de son intégrateur Denkavit. « Une fois nourris, à 13 h, les animaux ont été évacués, en sécurité, vers un élevage de Binic qui avait 260 places libres. » Assurée sur les pertes d’exploitation, l’éleveuse attend le passage des experts et s’inquiète : « Les 240 veaux qu’il reste ne suffisent pas à couvrir les annuités. » Elle veut repartir le plus vite possible. « J’adore mon métier. La tempête a détruit la moitié de mon outil mais pas ma passion. »