Écomusée de la Bintinais à Rennes (35)
Au début du XXe siècle, l’Ille-et-Vilaine produisait plus de cidre que tous les autres départements français. « À la Bintinais à Rennes, jusqu’à 100 000 L de cidre étaient confectionnés chaque année. Un commerce lucratif qui visait les nombreux consommateurs urbains, les cafés à cidre, la caserne… », expliquent les animateurs de l’Écomusée, situé sur cette ancienne ferme qui totalisait 1 000 pommiers à l’époque.
Des vergers conservatoires à partir de 1987
« Les paysans détenaient le savoir-faire des pommages : l’assemblage de diverses variétés de pommes à cidre – douces, amères et acides – pour créer un goût particulier à chaque exploitation. » Alors que de nombreux pommiers ont été arrachés sur la 2e moitié du XXe siècle, l’Écomusée a créé à partir de 1987 des vergers conservatoires regroupant aujourd’hui plus de 120 variétés de pommes (environ 250 arbres), destinées aux jus ou à la table. L’objectif est de « favoriser le maintien et le renouveau de cette pratique vieille de plusieurs siècles. »
Le dimanche 5 novembre, un large public multigénérationnel est venu participer à la démonstration « Cidre au pressoir », montrant les étapes-clés de la fabrication « à l’ancienne » du pétillant breuvage. « Les pommes mûres tombées sont ramassées en automne puis lavées mais pas épluchées : c’est la peau qui contient les levures permettant la fermentation. Les pommes passent d’abord dans un broyeur puis la pulpe est pressée à l’intérieur d’une claie circulaire, donnant le jus. » Suivent le processus de fermentation et le soutirage par siphon à plusieurs reprises.
Les paysans détenaient le savoir-faire des pommages.
Les visiteurs ont pu entrer dans l’ancien cellier de l’Écomusée, « construit à la fin des années 1800, en terre battue, très sombre, permettant de maintenir une température constante autour de 16-18 °C. » On y trouve « les anciens fûts et tout le matériel du producteur de cidre et du parfait encaveur : un métier aujourd’hui disparu qui consistait à décharger les tonneaux dans les caves en ville. »
La pomme se déguste de 1 000 façons
Mais la rencontre ne s’arrêtait pas au cidre. Des démonstrations culinaires concoctées par Valentine Bossu, cuisinière et conseillère en équilibre nutritionnel pour Terralim, ont donné un aperçu des 1 000 façons de déguster la pomme, ce fruit accessible toute l’année. À l’image de ces délicieuses « Crêpes aux pommes à compote »
servies avec une noisette de beurre ou encore les « Cigares aux pommes » réalisées avec des feuilles de brick, des amandes, du miel…
Les pommes ont aussi des propriétés anti-cancer via leurs antioxydants, gélifiantes via la pectine, un effet contre la gingivite et la parodontie… Depuis le Moyen-Âge, elles sont utilisées pour soigner les blessures, nourrir la peau, la rendre plus claire. « D’où l’origine du mot ‘pommade’ », a souligné Jacques Brégeon, venu présenter la gamme de produits cosmétiques (IsB) à base de pomme développée par son épouse Véronique, décédée fin 2022. En 1991, elle avait repris l’établissement familial LeCoq-Gadby, créé en 1902 à Rennes où il est renommé.
Fruit de la beauté
Le lieu propose aujourd’hui des activités d’hôtel, spa et traiteur. « Dans l’espace bien-être, nous utilisons les produits cosmétiques à base de pomme à cidre biologiques, mis au point par des professionnels : huile de pépins de pomme, baume pour visage, exfoliant. Tous les actifs ont fait l’objet d’études scientifiques dont les polyphénols qui ont des vertus de protection et régénération cellulaire ou encore amincissantes. Ces produits ne contiennent pas d’ingrédient chimique. » Jacques Brégeon recherche actuellement une personne intéressée pour faire fructifier l’entreprise de cosmétiques initiée par sa femme.
« Tous au verger ! » s’attaque au gaspillage alimentaire
Autre initiative autour de la pomme, l’association « Tous au verger ! » a notamment pour mission de lutter contre le gaspillage alimentaire en valorisant les fruitiers délaissés, dans un esprit de convivialité. « Nous sommes implantés autour de Vitré mais souhaiterions multiplier ce type de démarche. Un autre collectif existe à Chantepie », expliquent les bénévoles. Outre des ramassages de fruits dans des domaines publics ou privés et leur distribution (épicerie solidaire, café associatif…), ils organisent des stages de formation ou des animations autour de la taille, du greffage, de la formation fruitière… « Éviter le gaspillage, c’est aussi savoir entretenir les arbres pour qu’ils continuent à donner. » La troupe agit en parallèle pour la sauvegarde des variétés anciennes, « souvent délaissées mais robustes et avec davantage de goût. »