La grande majorité des déchets ne se trouvent pas dans les poubelles ménagères ; ils sont invisibles car ils découlent de la fabrication des produits. Souvent loin des yeux. Et souvent ignorés. Les équipements électroniques sont les champions de l’empreinte environnementale. « Il faut mobiliser 220 kg de matière première pour fabriquer un Smartphone (minerais, pétrole, charbon…) », indique Aline Gubri, consultante en transition environnementale, intervenante à Saint-Avé, lors de la Semaine de réduction des déchets. « Pour un ordinateur portable, c’est 800 kg ». Un gaspillage de ressources naturelles auquel il faut ajouter les gaz à effet de serre émis pendant la fabrication. Le micro-ondes défie toute concurrence, avec ses 2 tonnes de matières nécessaires (source Ademe). L’extraction des minerais indispensables est également sujette à discussion : pollutions, conditions de travail, niveau de sécurité dans les mines… Bref, mieux vaut réfléchir avant de se séparer de son vieux frigo démodé, qui conserve toujours les aliments au frais.
Le neuf, clinquant mais polluant
« Il faut éviter d’acheter des équipements neufs », conseille la rédactrice du magazine Parents. « L’occasion fait souvent l’affaire ». Les sites dédiés aux transactions entre particuliers sont légion (Au vide grenier, Leboncoin…), comme les ressourceries. Les offres de produits reconditionnés sont nombreuses ; plusieurs enseignes en proposent désormais (Fnac, Darty, Ikea seconde vie…). « La location est également une solution pour éviter d’acheter. Les entreprises comme Kiloutou ou Loxam mais aussi le site en ligne Kiwiiz permettent d’y avoir recours ». L’autopartage se développe, grâce également à des sites sur Internet. « Nous devons aller vers une économie de partage. Une voiture individuelle n’est pas toujours justifiée ». La réparation n’est plus une habitude ; des décennies du ‘jetable’ ont imprimé les esprits. « Le grille-pain ne fonctionne plus ? On en achète un autre. Pourtant, les pannes sont souvent toutes bêtes ». Là encore, un simple accompagnement en ligne sur des sites dédiés (Spareka) ou une visite dans un atelier consacré à la réparation (Repair café) permettent de réparer, sans connaissances préalables. Le passage par un professionnel est parfois inévitable ; la réparation peut coûter autant que le neuf. La volonté de préserver l’environnement est alors mise à l’épreuve.
Vers une économie de partage
Des faux besoins à foison
« A-t-on besoin d’une tablette numérique, qui requiert 420 kg de matières premières pour sa fabrication, quand on a déjà un téléphone et un ordinateur ? ». Non, probablement. Pas plus qu’une brosse à dents ou une poivrière électrique. Les objets manuels font très bien l’affaire sans beaucoup de labeur. « Il faut éviter le surdimensionnement. Entre une télé 45 pouces et une autre de 55 pouces de même marque, il peut y avoir jusqu’à 1 tonne de matière première, requise pour la fabrication, de différence ». Et 4 à 5 fois plus de GES émis. Que dire des spacieux SUV et de leurs kilos superflus dont raffolent les citadins ? Si l’emballage des produits et leur transport génèrent des déchets, « ils sont bien moins préjudiciables que la fabrication ». Une donnée valable également pour les émissions de gaz : à l’échelle mondiale, 75 % des émissions de GES des produits agricoles sont réalisées avant la sortie de la ferme.
Les vertus du compost
Les ordures ménagères représentent un tiers des déchets, avec 130 kg par personne et par an. « Le compost retourne à la terre et évite la fabrication d’engrais très énergivores ». Différents systèmes existent, même en intérieur, grâce aux lombrics, « ça ne sent pas », assure la spécialiste. Ces composteurs remplacent favorablement l’incinérateur qui élimine de l’eau avec force énergie ou la libération sauvage de méthane en décharge. Quoi qu’il en soit, le zéro déchet est un objectif difficile à atteindre. « Une démarche jusqu’au-boutiste de réduction des déchets peut être source de frustration. Il vaut mieux avoir une démarche imparfaite mais durable dans le temps ».
Une campagne de publicité mal passée
L’Alliance du commerce ne décolérait pas. En novembre dernier, cette fédération a demandé le retrait sans délai de la campagne de publicité vantant la sobriété « Épargnons nos ressources », à l’initiative de l’Ademe, diffusée en plein Black Friday et juste avant les fêtes de fin d’année. On y voyait des clients dans des magasins qui demandaient conseil à un vendeur pour choisir entre deux vêtements neufs. « Aucun des deux », leur répondait celui qui se révélait être un « dévendeur ». Un humour ou un second degré qui a agacé le monde du commerce qui met en avant le chiffre d’affaires et les emplois générés par le secteur de l’habillement. Ce Black Friday a été mauvais au niveau des ventes. Le début d’une prise de conscience ?