Dossier technique

L’essence du commerce

Mener à bien un projet de diversification suppose d’avoir bien défini sa stratégie. Mais il est bon de savoir aussi faire preuve d’adaptation afin de saisir les opportunités et de coller aux évolutions du marché. Témoignage.

18563.hr - Illustration L’essence du commerce
Alexandre et Élodie Richard, aux côtés d’une partie de leurs salariés, sur le seuil du magasin de Lesneven (29). La boutique est ouverte tous les jours, sauf le lundi après-midi et le dimanche.

Avec son cochon rose flashy en enseigne, impossible de rater le magasin « Le groin de folie ». Située dans une rue commerçante, à proximité immédiate du centre de Lesneven, dans le Finistère Nord, la boutique ouverte par Alexandre Richard et son épouse Élodie a fière allure. À la fois « éleveurs, transformateurs et commerçants », ils ont repris, fin 2021, les locaux d’une institution locale quasi centenaire, la Maison Potiron, où quatre générations de bouchers-charcutiers se sont succédé. Et depuis, avec passion et dynamisme, le couple écrit une nouvelle page d’un riche parcours professionnel. 

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Dans les rayons du magasin, les produits maison sont à l’honneur.

L’histoire débute en 2012, lorsque Alexandre, après avoir notamment travaillé comme salarié au sein d’un service de remplacement, reprend un élevage de porcs en Label rouge, sur la commune de Ploudaniel. L’année suivante, il apprend qu’un voisin, spécialisé dans le canard à gaver, se sépare de son laboratoire. Pour le jeune agriculteur qui mûrit depuis plusieurs années un projet de vente directe, c’est le moment de franchir le pas. « En février 2014, nous avons ouvert un petit magasin de vente, 7 m² attenant au laboratoire. On n’y proposait que du fait maison, issu de la transformation de nos cochons ». Un boucher prestataire assure alors la fabrication des produits, tandis qu’Élodie se forme à la charcuterie. « Cela a fonctionné très rapidement auprès de la clientèle locale. Les gens nous disaient tout leur plaisir de retrouver le goût du pâté et du jambon maison. Mais ils nous demandaient aussi où se procurer du bœuf, des légumes… »

La capacité d’adaptation 

Fort de son réseau, l’éleveur décide, en 2017, de proposer une gamme élargie de produits : viande, fruits, légumes… Le tout en continuant à jouer la carte de la proximité et en s’approvisionnant auprès de producteurs partageant sa philosophie. La surface de vente passe alors de 7 à 75 m². Lorsque survient la pandémie de Covid-19, la fréquentation du magasin triple. « Nous avons vu arriver à ce moment-là une clientèle plus urbaine que nous avons su fidéliser », précise le trentenaire. Toutefois, les horaires d’ouverture se révèlent être un facteur limitant pour les consommateurs. 

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Pour répondre aux attentes de la clientèle, le magasin propose, en plus de la boucherie et de la charcuterie, épicerie, fruits, légumes, vins, bières, volailles et fromages.

À l’issue des épisodes de confinement, le couple entame une réflexion. « Nous avions beaucoup travaillé et étions sortis un peu fatigués de cette période particulière. Pour pouvoir poursuivre notre développement dans de bonnes conditions, il nous fallait une seconde boutique avec du personnel ». D’où la reprise de la Maison Potiron et de ses salariés. Ouvert en février 2022, le magasin lesnevien, avec ses 120 m² de surface de vente, ses plages horaires élargies, son espace accueil dédié aux enfants et ses rayons diversifiés (boucherie, charcuterie, épicerie, fruits, légumes, vins, bières, volailles, fromages), connaît une forte croissance. Contrairement à celui de Ploudaniel, distant de quelques kilomètres, qui a vu sa fréquentation s’éroder au fil des mois. Décision a donc été prise de fermer la boutique sur l’exploitation et d’en profiter pour agrandir la partie laboratoire. Parallèlement, un site d’élevage a été cédé, « nous sommes ainsi passés de 6 000 à 1 000 cochons par an, soit la quantité que nous transformons et commercialisons nous-mêmes ».

Trouver l’équilibre

Un nouvel équilibre qui désormais satisfait pleinement Alexandre, tant sur le plan professionnel que personnel. Mais il est clair : la vente ne s’improvise pas. Il s’agit d’un métier à part entière et non d’une panacée pour tous les éleveurs en quête de diversification. « Le contact avec le client, cela ne s’apprend pas. On l’a ou pas. Moi, c’est quelque chose qui me plaît vraiment ». Le Finistérien invite également ceux qui s’apprêteraient à se lancer à bien choisir l’implantation de leur lieu commercial. « Un magasin de vente à la ferme éloigné des axes fréquentés peut avoir du mal à trouver son public ». 

Lui a su saisir les opportunités qui se présentaient et réorienter son projet pour répondre au mieux aux attentes de la clientèle. Et aujourd’hui, il ne reviendrait pas en arrière. « Je crois que si l’on me demandait de redevenir uniquement éleveur, j’aurais un peu peur de la monotonie. J’apprécie de jongler entre mes différentes casquettes : élevage, transformation, commerce ». Preuve qu’avec de la volonté, du travail et petit « groin de folie », tout est possible !

Jean-Yves Nicolas

Du sur-mesure (opinion)

Accompagner un projet de diversification tel que celui porté par Alexandre et Élodie Richard nécessite de l’agilité. C’est du sur-mesure, il faut être capable de répondre à des demandes qui sont à la fois celles d’un agriculteur mais aussi d’un commerçant, avec, par exemple, le volet monétique du magasin. La diversité des solutions bancaires que nous pouvons proposer permet de couvrir l’ensemble. Et le rôle du conseiller bancaire prend alors tout son sens.

Maëlle Vanzée-Le Bris, responsable de clientèle agricole, pôle d’expertise CMB de Plabennec.

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