Les annonces du Premier ministre pour refroidir la colère paysanne ont davantage satisfait les producteurs de grandes cultures que les éleveurs. Dans de nombreuses situations bretonnes, les jachères ne sont en effet pas un problème grâce au bocage et aux coefficients d’équivalence qui permettent d’atteindre le niveau de Surfaces d’intérêt écologique (SIE) requis. Sur les phytos, la polyculture-élevage offre aussi plus de marges de manœuvre pour réduire les doses grâce aux rotations. En ce qui concerne la taxe sur le GNR, les éleveurs sont en valeur relative de petits consommateurs d’énergie ; l’impact sera donc modéré. Par contre sur l’interdiction de retourner les prairies, aucun engagement ferme n’a été fait aux éleveurs.
Abroger arbitrairement certaines normes peut être contre-productif pour les éleveurs
Ce ne sont pas de mesures isolées, ni d’emplâtres qu’a besoin l’agriculture, mais bien d’une articulation globale entre économie, social, souveraineté alimentaire, etc. Sans oublier le climat et la biodiversité, dont trop de responsables n’ont pas encore saisi le véritable enjeu. Cette cohérence et ce raccordement des décisions entre elles sont absents des annonces de Gabriel Attal. Quid, par exemple, des accords du Mercosur dénoncés du bout des lèvres par le Gouvernement français alors qu’en même temps les députés du Parlement européen proches de Macron sont prêts à voter cette entente de libre-échange particulièrement menaçante pour les éleveurs de bovins. Tout comme abroger arbitrairement certaines normes sans en mesurer toutes les conséquences peut être contre-productif pour les éleveurs européens. Privés du bouclier normatif, ces derniers ne pourraient plus invoquer de clauses miroir pour se protéger des importations de poulet ou de viande bovine sud-américains ne respectant pas les standards sociaux et écologiques européens. À éteindre le feu dans la précipitation, on oublie parfois de couper le gaz…
