Au sud de Parme, la « Strada del prosciuto », ou route des jambons, amène directement à Langhirano, le fief du cochon. Un endroit idéalement placé, balayé par l’air frais qui vient de la mer en traversant bois et montagnes des Apennins et la brise (air chaud) de la plaine du Pô, alternance favorable à l’affinage des célèbres jambons de la province. 160 salaisonniers sont présents sur le territoire. Pour cela, les bâtiments sont tous alignés de la même façon, perpendiculairement à la route, sur 3 étages. Au rez-de-chaussée, c’est la ligne du froid avec la réception et le salage des cuisses, le 2e niveau recueille le pré-affinage avec de grandes fenêtres verticales, ouvertes quand les conditions extérieures le permettent. Quant au sous-sol, on y retrouve les jambons affinés.
160 salaisonniers présents sur le territoire
Une étape par jour
Sur cette commune, les nouveaux bâtiments de la coopérative Zuarina, réservés à la production du jambon de Parme, ne font pas défaut. Construits en 1990, ils ont conservé cette disposition. « Ici, nous réceptionnons 2 000 jambons lourds de plus de 15 kg (18 kg maximun autorisés par l’AOP), provenant du nord de l’Italie, chaque lundi », introduit Marcello Barilli, responsable de la production. La sélection est rigoureuse à l’entrée (15 à 20 % de rejet), pour obtenir un produit standard à la sortie. Tout est ensuite réalisé sur site. « Si le jambon peut être vendu à partir de 12 mois depuis le début de la transformation, nous ne les vendons qu’à partir de 18 mois, pour un produit de qualité. » Le premier salage a lieu le mercredi à la main, « après un temps d’homogénéisation des produits. Et vu que nous ajoutons peu de sel, il faut savoir bien le placer, tâche confiée à des maîtres-saleurs : une granulométrie de sel pour la couenne, une autre pour la viande pour qu’il se diffuse plus vite… » Durant 6 jours, des variations de températures (de 1° à 7,5 °C) et d’hygrométrie vont permettre cette absorption de sel dans un premier frigo. Le mardi suivant, l’excès de sel est enlevé et une nouvelle couche est déposée.
Du temps, de la passion et de l’expérience
Plus de 3 semaines plus tard, le jambon rejoint une cellule de « pré-repos », avec une ventilation forcée. Le produit a changé de couleur : « Le sel a « cuit » le maigre, le gras a blanchi », décrit-il. Une étape nécessaire de 30 jours pour éliminer l’eau des cuisses, phase de plus en plus difficile avec des taux d’accroissement plus rapide en élevage. En tout, il se sera écoulé 128 j entre l’entrée du jambon et la fin de la transformation à froid (90 j exigé pour l’AOP), « durant laquelle le jambon aura perdu 17 à 18 % de son poids mais qui aura permis à la flore de se développer, qui affinera l’arôme du jambon sec. »
Perte d’un tiers de leur poids d’arrivée
S’ensuivent les phases de lavage et de séchage. « En 6 jours, la température du jambon est relevée de 2 à 24°C puis abaissée à 12°C, cela permet d’attendrir la viande et de favoriser le redémarrage des levures. » Puis les jambons changent d’étage, où ils restent à une température de 18 °C, remplaçant la phase où autrefois les jambons étaient mis à sécher au soleil. Entre l’entrée et la sortie de l’affinage, les jambons auront perdu de 23 % à 30 % de leur poids d’arrivée. La perte du poids est limitée par l’adjonction de saindoux (mélangé à du sel, du poivre, de la farine de riz) sur la partie maigre, pour éviter le dessèchement autour de la noix. « À partir de ce moment-là, les changements sont plus lents. » Ce premier soin du jambon sera renouvelé vers 15 mois. À 16 mois, le jambon descend dans les caves, où il sera régulièrement analysé et marqué au fer rouge, d’une petite couronne ducale à 5 pointes, s’il satisfait les exigences olfactives des 5 points de contrôle par le Consorzio, organisme de gestion de l’AOP.
De la sélection en élevage
Pour la production du Jambon de Parme, seules les races Large White, Landrance et Duroc (en croisement) sont sélectionnées. Ils sont alimentés avec du maïs, de l’orge, et du petit lait directement de la filière locale de production du Parmesan Reggiano ! Ne sont admis que les animaux âgés d’au moins 9 mois et d’un poids minimum de 140 kg, avec un jambon frais pesant de 12 à 18 kg. Le porc est payé aux éleveurs selon le prix de référence du marché national CUN, auquel une prime de 6,13 € par cuisse est accordée. La coopérative Zuarina distribue également un bonus pour les gros jambons.