Sur les 30 dernières années, les productions avicoles françaises ont baissé de 17 % alors que les consommations de viande de volailles ont progressé de 56 %. Aucune autre filière animale ne vit une telle situation. En bovin, entre 1993 et 2022, la décapitalisation des cheptels qui affiche – 29 % va bien plus vite que la déconsommation qui est de – 8 %. En porc, la décapitalisation démarre. « Des aviculteurs arrêtent leur métier alors que la consommation de viande de volaille ne cesse d’augmenter. Mais que fait la filière ? », interroge Olivier Mével, maître de conférences à l’Université de Bretagne Occidentale lors des journées de la recherche avicole (JRA) qui se sont déroulées à Tours les 20 et 21 mars.
Du poulet au prix de la viande maturée
« L’inflation alimentaire qu’a connue la France en 2022 et 2023 a contribué à modifier en profondeur les habitudes alimentaires des Français. Les consommateurs se sont tournés vers le poulet, moins cher que le porc ou le bœuf. Si bien que la consommation française de poulet est passée devant celle de l’Allemagne et de l’Espagne ce qui correspond à une augmentation de + 5 % en 2022 par rapport à 2021 », indique Olivier Mével. Sur cette période, ce sont les prix des produits de base qui ont le plus augmenté. Sucre, huile, farines, beurre, pâtes, riz ont vu leur prix progresser de plus de 30 % entre 2021 et 2023. « La filière avicole française est restée raisonnable pour maintenir des prix acceptables ce qui n’a pas été le cas des GMS. On a vu du filet de poulet au prix de la viande de bœuf maturée. Tout cela favorise le développement des importations avec des consommateurs qui sont à la recherche du meilleur prix. »
La filière doit s’adapter
Pour Olivier Mével, la valeur perçue par le consommateur en linéaire de grande surface évolue et la filière doit s’adapter au plus vite. La filière volaille s’inscrit durablement sous la contrainte du prix. « La valeur perçue : goût, origine, plaisir, bénéfice santé et engagement environnemental pèsent aujourd’hui moins que le prix proposé au consommateur. Cela se vérifie aussi pour les volailles sous signes officiels de qualité. »
La consommation française de poulet est passée devant celle de l’Allemagne et de l’Espagne.
Un arbitrage entre la qualité et le prix
Une étude réalisée en Bretagne en 2023 auprès d’un échantillon de 32 personnes révèle que pour 56 % d’entre eux la variable prix impacte leur comportement d’achat sur un poulet entier. 13 % ont restreint leurs dépenses alimentaires en volaille entière pour une question de pouvoir d’achat. 43 % recherchent le meilleur arbitrage entre la qualité de la viande de volaille et le prix. 29 % vont acheter uniquement du poulet certifié par une démarche qualité : label rouge, bio, fermier, AOP. Enfin, 14 % ont modifié leur comportement d’achat pour aller vers des produits plus responsables : respectueux de l’environnement, soucieux du bien-être animal, garantissant une juste rémunération de l’éleveur.