« De zones stressantes à des places plus froides et humides : nous retrouvons quasiment dans l’ouest de la France l’intégralité des conditions que l’on a sur notre zone de chalandise maïs ensilage, de la France à l’Ukraine », présente Benoît Revol, responsable sélection Europe du Nord et sélectionneur maïs ensilage chez Pioneer. Avec un réseau de testage du maïs ensilage principalement développé en France, Allemagne et Benelux, le testage est intensif en Bretagne-Normandie-Pays de la Loire, géré par l’équipe de recherche de Pacé (35). Les hybrides sont testés localement, avec un réseau important en Bretagne sur environ 25 sites de 2 à 10 ha. « L’effet année y est fortement marqué et la fin de collecte des dates de floraison à l’Ouest du réseau correspond parfois à l’arrivée des ensileuses dans les champs à l’Est, d’où l’importance d’avoir un gros maillage d’essais, une grande répétabilité des essais et une surface géographiquement étendue », explique le sélectionneur.
La sélection, c’est un jeu de nombre
Vers des maïs plus résistants et résilients
Aucune variété n’arrive sur le marché avant un testage de 5 ans, qui doit bien sûr satisfaire les évolutions environnementales : une année humide comme en 2021, une année sèche comme en 2022 ou une année plus froide comme en 2023… Au cours de ces 5 années, les données du réseau Grand Ouest s’agrègent avec les données des autres pays du réseau de testage. Alors que recherche-t-on aujourd’hui sur une nouvelle variété ? « On recherche avant tout une couverture du sol rapide au début du cycle, pour limiter la concurrence avec les adventices, limiter les désherbages et l’évaporation du sol », insiste-t-il. Pour cela, environ 80 000 microparcelles sont semées dans le Grand Ouest. Par la suite, les techniciens utilisent un drone plusieurs fois au cours du cycle du maïs afin de collecter des données telles que celles servant à l’analyse de la biomasse. « On vise également une stabilité de rendement des variétés entre les lieux, les années et les conditions. » « Pour limiter les intrants et l’irrigation, on travaille aussi de plus en plus sur le système racinaire. » Une donnée plus compliquée à gérer car non visible… « Et, pour nous chez Pioneer, on recherche également de la souplesse de récolte en s’orientant vers les dentés farineux, avec un grain plus facile à éclater et un amidon plus digestible dans le rumen que les cornés. Ainsi que sur le ‘stay-green’, pour préserver les sucres solubles en fin de cycle. C’est aussi une manière de nous différencier. »
Les évolutions climatiques, nouvelle contrainte sur la sélection
Il faut bien évidemment adapter le cycle de culture pour résister aux évolutions climatiques. « Différentes pistes s’offrent à nous : on cherche à précocifier le semis pour viser une floraison avant les vagues de chaleur, sans pour autant récolter début août ! » Le travail s’axe donc sur la longueur du cycle avant et après floraison. Il s’intensifie aussi sur des variétés résistantes à des manques d’eau précoces, y compris dès le semis, et non pas seulement autour de la floraison. Le développement racinaire est une des réponses. « Pour cela, on progresse plus vite dorénavant avec de nouveaux outils : ce sont des prédictions, basées sur des algorithmes sur les données terrain des années passées et le génotype de la variété. On associe des zones du génome du maïs à des résultats de rendement ou à la résistance à la verse… Grâce à ce pré-screening, on peut prédire des dizaines voire des centaines de milliers d’individus qui ne verront jamais le jour. Auparavant, si on voulait tester 1 000 hybrides, on produisait 1 000 hybrides, mais on n’en gardait que très peu au fur et à mesure du testage. Aujourd’hui nous pouvons toujours en créer 1 000 mais à partir de plus de 100 000 hybridations virtuelles. Les combinaisons retenues cochent déjà les cases sur le papier pour de nombreux critères hautement prédictibles et seront mises en testage pour se focaliser sur la stabilité de la performance ou sur les critères plus difficiles à prédire. Si les 7-8 années de testage et d’inscription de la variété restent toujours incompressibles, on augmente théoriquement nos chances de succès. La sélection, c’est un jeu de nombre. Nous, sélectionneurs, passons la majorité de notre temps à éliminer du matériel. Plus le matériel de départ est pré-sélectionné et performant, plus les choix finaux sont adaptés au marché et aux besoins des agriculteurs. »