« L’accord de Paris a fixé des objectifs pour limiter le réchauffement climatique. Il n’a pas été demandé à l’agriculture une décarbonation totale, elle devra participer à hauteur de 50 % à la séquestration du carbone. En aviculture, un tiers des émissions de gaz à effet de serre (GES) sont directes et liées à la consommation de propane pour chauffer, d’électricité pour ventiler et faire tourner les moteurs dans les poulaillers et le gasoil pour les tracteurs ou télescopiques nécessaires en cours d’élevage, pour le curage ou la préparation des poulaillers entre 2 lots », indique Vincent Blazy de l’Itavi lors de l’assemblée générale de l’Anvol qui s’est déroulée le 10 avril à Angers (49).
Ne plus chauffer au gaz
L’effacement de la consommation de propane peut se faire en installant une chaudière à biomasse. « Par contre, les fumiers, lisiers et fientes émettent des GES qui seront difficiles à contenir surtout avec les modes de stockage actuels de ces effluents », constate Vincent Blazy. Et Jérémy Choquet, aviculteur dans le Morbihan, de rebondir : « Je suis installé avec mon père sur une exploitation spécialisée en volaille avec 9 400 m2 de poulaillers. Nous avons installé une chaudière à biomasse pour réduire notre consommation de gaz. Elle couvre 97 % des besoins en chauffage du site sur lequel elle est installée. Cela représente une économie de gaz de 114 tonnes par an. Le bémol est que les éleveurs n’ayant pas accès à la subvention de 50 % à laquelle nous étions éligibles ne peuvent pas investir car sans cette subvention l’investissement n’est pas rentable. »
Réduire la part de soja
« Le travail sur l’indice de consommation, l’amélioration génétique, la formulation de l’aliment via un sourcing de matières premières bas carbone pour tenter de réduire la part de soja qui représente 40 à 50 % des GES de l’aliment des volailles sont des leviers à ne pas négliger. Un autre levier serait de réintroduire les farines animales dans les formulations », émet Vincent Blazy. Pour illustrer les améliorations des indices de consommation, Jérémy Choquet donne ses chiffres : « En 2018, notre IC en poulet lourd était de 1,71 aujourd’hui il est à 1,55. Sur 100 tonnes de poulet qui sortent de l’élevage, cette différence d’IC nous fait économiser 16 tonnes d’aliment. » Dylan Chevalier, responsable RSE chez LDC, ne manque pas de rappeler : « La meilleure façon de limiter les émissions de CO2 est de proposer de la volaille française au consommateur. Mais ces différences d’émission ne sont évaluées nulle part. »
Le consommateur n’est pas prêt à payer
« Nous allons devoir travailler sur une génétique qui accepte des baisses de taux de protéines dans l’aliment sans perdre en performances pour réduire le bilan carbone de l’aliment », estime Ludovic Michel, directeur général du groupe Michel. Il cite l’exemple du soja non OGM qui n’avait avant que 13 €/t de différence avec l’OGM et qui aujourd’hui affiche 130 €/t de surcoût. «Pour du soja non déforesté un surcoût de 3 €/t est acceptable mais on sait que cela va suivre la tendance du non OGM. » Aurélie Menenteau, de chez système U, ajoute : « Ce qui compte pour le consommateur, c’est d’abord le prix puis la santé, il n’est pas prêt à payer pour le reste. »