L’héritage jaune breton

En Bretagne, on se moque parfois des touristes qui arborent fièrement des vestes imperméables colorées et des bottes assorties. Peut-être veulent-ils inconsciemment rendre hommage à l’inventeur du ciré jaune lors de leur venue dans la région.

Nadine Bertholom-Cotten et François Bertholom dans l'usine Guy Cotten de Trégunc - Illustration L’héritage jaune breton
Nadine Bertholom-Cotten et François Bertholom | © Paysan Breton

Originaire de Saint-Yvi dans le Finistère, Guy Cotten naît de parents agriculteurs en 1936. Entrepreneur dans l’âme, il décide dix-huit ans plus tard de vendre des vêtements de pêche sur le port de Concarneau. Le jeune homme surfe alors sur le début de l’industrialisation du PVC pour proposer aux pêcheurs et aux marins des équipements plus légers, plus durables et hautement imperméables. Lors de leurs sorties en mer à l’époque, ils portaient surtout des vêtements lourds en coton enduit, peu pratiques et pas très agréables… Guy Cotten propose alors des produits conçus à partir d’un tissu fait de mailles de polyester recouvert d’une induction de PVC. En 1966, la veste emblématique de la marque, la Rosbras, se pare de la couleur jaune pour permettre à ceux qui la portent d’être plus visibles en mer.

Très vite, la gamme s’étoffe avec des produits destinés aux agriculteurs. « Les communes limitrophes de Concarneau étaient très rurales dans les années 60 », raconte François Bertholom, directeur général de l’entreprise. « L’activité des agriculteurs demande, à quelques détails près, le même niveau de protection que celle des métiers de la mer. » Et en 1970, l’entreprise grandit encore grâce à l’arrivée des écoles de voile et ajoute à son catalogue des vêtements destinés à la plaisance. Six ans plus tard, un nouvel atelier ouvre à Trégunc, commune où le siège et l’usine principale se situent aujourd’hui.

Une fabrication majoritairement française

La fabrication des produits est réalisée en France et à Madagascar. « Nous avons les mêmes standards de production entre les différentes usines », affirme Nadine Bertholom-Cotten, présidente de l’entreprise. « Nous accordons une grande importance à la solidité et à la réparabilité de nos vêtements. Parfois, nous recevons certains produits de notre gamme ‘loisirs’ qui ont 30 ou 40 ans et qui nécessitent un changement de fermeture éclair ou une nouvelle couture. » La fabrication française permet également à la marque d’avoir une réactivité importante pour faire évoluer ses vêtements. « Quand le SAV nous remonte plusieurs cas similaires, nous travaillons sur des améliorations », indique la présidente. Par exemple, les producteurs d’artichaut utilisaient auparavant les cottes à bretelles créées pour les marins. Celles-ci n’étant pas faites pour marcher longtemps, les agriculteurs se plaignaient de frottements désagréables au niveau des jambes. « Les coutures ont été revues et nous avons ajouté des renforts pour rendre la cotte plus confortable pour les producteurs. Nos vêtements sont adaptés à chaque métier. »

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La découpe des laizes se fait automatiquement et avec précision.

450 000 produits par an

Chaque année, un million de mètres de PVC sont utilisés pour produire environ 450 000 pièces. 75 % de la matière première utilisée est française et 15 % vient de Belgique. Le néoprène, un matériau plus spécifique et utilisé pour des produits plus rares, vient quant à lui du Japon. « Toutes les découpes sont programmées sur ordinateur et réalisées par un automate », déclare Nadine Bertholom-Cotten. « Cela permet d’optimiser au maximum la matière première et de n’avoir que 10 % de pertes. Avant 1986, toutes les découpes étaient faites à la main. » Une fois découpés, les différents éléments sont assemblés par couture ou par soudure haute fréquence. Ce dernier procédé consiste à faire fondre et à fusionner les pièces entre elles, garantissant ainsi une grande imperméabilité. Pour assembler une cotte ou une veste, 45 minutes de temps de travail effectives sont requises. La nouvelle usine de 5 000 m2, inaugurée en 2019, a été pensée pour améliorer les conditions de travail des salariés. Les sièges et les espaces de travail sont ergonomiques et permettent de réduire les TMS (troubles musculosquelettiques). « La lumière naturelle y est abondante et le revêtement des murs insonorise l’espace », précise Nadine Bertholom-Cotten. « Les machines à coudre pneumatiques sont aussi beaucoup plus silencieuses. ». Sur le toit, 600 m2 de panneaux photovoltaïques permettent de produire 40 % des besoins électriques du bâtiment.

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L’environnement de travail a été pensé pour réduire les TMS 
et augmenter 
la production.

Les femmes ne sont plus en reste

Jusqu’alors, les vêtements Guy Cotten étaient mixtes et par conséquent, pas toujours adaptées aux utilisatrices. En 2024, l’entreprise a donc lancé une gamme femme pour la pêche et l’agriculture. Les coupes sont maintenant adaptées aux morphologies féminines (plus courtes, légèrement resserrées aux épaules et élargies au niveau du bassin).

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Le ciré Isopop, décliné ici pour les femmes travaillant en agriculture.

Alexis Jamet

Un logo intemporel

Le petit bonhomme jaune, véritable identité de Guy Cotten, a été créé par le graphiste quimpérois Alain Le Quernec en 1974. « Ce n’était pas du tout ce que mon père avait en tête », se souvient Nadine Bertholom-Cotten. « Il pensait plutôt à un personnage sautillant sous la pluie et n’était pas convaincu par ce bonhomme jaune qu’il trouvait trop raide. Mais Alain Le Quernec n’a jamais voulu le modifier. » Sûrement à raison…

TRÉGUNC (29)


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