La petite route de campagne qui serpente entre les habitations du hameau de la Croix Mayet, dans la campagne sérentaise, débouche sur un paradis de diversité florale. Près d’un demi-hectare de plantes dont les feuilles et les fleurs affolent les papilles des visiteurs gastronomes. Les jeunes pousses de mizuna, un chou japonais au goût légèrement poivré, de cresson, de périlla, de basilic, de ficoïde ou de diverses variétés de moutardes asiatiques se relaient toute l’année dans le jardin « Des herbes aux fleurs », pour livrer leurs étonnantes saveurs. Les plantes aromatiques, cultivées sur place et livrées en frais – aneth, coriandre, tagettes, agastache, livèches, sauges…- sont complétées par une cueillette saisonnière d’essences sauvages : mouron blanc en hiver, jeunes chénopodes en été, aquillée millefeuille, oxalis au goût acide…
Production de graines
« Je cultive 140 espèces ou variétés par an », indique Mélanie Béziau, ancienne encadrante en maraîchage dans un foyer d’insertion, ancrée depuis 2017 à la Croix Mayet. « Je me suis installée progressivement, en débutant par de la cueillette de plantes sauvages comestibles. C’est ainsi que je me suis fait connaître des restaurateurs du secteur. Je n’avais pas assez de foncier pour cultiver des légumes ; je me suis donc orientée vers la production de fleurs et de plantes aromatiques ». Les 2 500 m2 de la maison familiale suffisent à son bonheur. Les 400 m2 de tunnel lui permettent de produire ses propres graines, à l’abri des oiseaux. « C’est un choix. Pour des raisons économiques mais aussi pour sélectionner des variétés adaptées au terroir ». À l’extérieur, en période estivale, cosmos, bourraches, capucines, bleuets, dahlias, chrysanthèmes et bien d’autres espèces colorent les lieux.
Une semaine bien rythmée
L’horticultrice travaille manuellement. « Je n’ai pas de motoculteur. Je favorise la vie du sol en conservant toujours un couvert. Les tontes, entre les planches, servent de paillage. J’apporte également un peu de compost provenant d’un élevage laitier voisin ». La grelinette, son outil de base, dérivé de la bêche et de la fourche, lui sert à décompacter et à aérer le sol. Les produits de protection des cultures se font rares. « Je mise sur la diversité des espèces et les jeunes pousses sont cueillies rapidement. Je n’ai pas utilisé d’anti-limaces cette année malgré la météo pluvieuse ». Les récoltes ont lieu les lundis et mardis de la semaine. Le mercredi est consacré aux livraisons ; les jeudis et vendredis à la production. « Je travaille les weekends au printemps, lors des pics saisonniers. Je récolte et livre 47 semaines dans l’année et je m’accorde 5 semaines de congés ».
Ateliers de reconnaissance des fleurs
Les jeunes pousses, lavées, conditionnées et étiquetées au laboratoire, constituent l’essentiel de son chiffre d’affaires. Les fleurs sont vendues à la pièce et livrées, comme l’ensemble des plantes, dans des emballages réutilisables. « Mes clients sont essentiellement des restaurateurs, des fromagers et des pâtissiers de la région de Vannes. J’expédie aussi une part de la production à distance, à J + 1 ». Des clients en recherche de fraîcheur et de haut de gamme pour le goût mais aussi pour la décoration. « J’approvisionne également un magasin de producteurs à Elven : des mini-concombres, du mesclun fleuri, des physalis, des bouquets à infuser… ». Mélanie se déplace dans des écoles primaires. « J’organise des ateliers de reconnaissance des plantes et de fleurs sauvages ». Elle accueille aussi des groupes, sur demande. L’occasion, pour les visiteurs, de découvrir les saveurs de plantes inconnues mais parfois très communes, souvent présentes dans leurs jardins, dont ils ne soupçonnaient pas le goût.
Bernard Laurent
Une association des producteurs de fleurs comestibles dans l’ouest
Mélanie Béziau adhère à l’association, connue sous l’acronyme APFCO, qui rassemble une dizaine de producteurs et productrices de fleurs comestibles fraîches, installés dans l’ouest de la France et respectant un mode de production respectueux de l’environnement et de la santé (Agriculture biologique et/ou Nature et Progrès). Ces producteurs se rassemblent 5 à 6 fois dans l’année et bénéficient du soutien du Gab de Vendée. Avec ces labels, ils garantissent à leur clientèle des fleurs de saison cultivées en pleine terre et de façon naturelle. Ils défendent la juste rémunération des producteurs tout en respectant les équilibres naturels : biodiversité, ressource en eau, sols vivants. La structuration associative permet l’entraide, le regroupement de petites entreprises et la recherche commune de partenaires pour développer une filière professionnelle solide sur les territoires concernés. Elle participe également aux travaux collectifs du groupe micro-fermes, suivi par le Gab du Morbihan.