Les 3 associés du Gaec Tête bêche ont écarté la solution passant par des forages pour s’approvisionner en eau au moment de leur projet d’installation. « Il y aurait eu plusieurs forages à faire, avec sans doute des débits aléatoires », résume Marianne Cahierre, associée avec Estelle Rannou et Hugo Poupon sur cette ferme en maraîchage diversifié de Plozévet (29), lancée il y a un peu plus d’un an. Le choix s’est plutôt porté sur la création d’une réserve d’eau de 650 m3, dimensionnée pour répondre aux besoins en irrigation d’une année complète. L’eau du réseau a toutefois été conservée par mesure de sécurité et pour le nettoyage des légumes.
Recueillir les eaux de pluie
6 000 m2 de cultures de plein champ cohabitent avec les tri-tunnels qui couvrent 2 000 m2. Cet équipement neuf est doté de parois à ouverture et fermeture motorisées, pour un environnement confortable. Dans ces derniers, les 2 chéneaux centraux collectent les eaux de pluie, les gouttières latérales ont la même fonction. Toutes les précipitations coulent par gravité vers le point bas de la parcelle, puis sont remontées par des postes de relevage vers la cuve. Le hangar de stockage et où se situe l’autre activité de la ferme, à savoir la fabrication de pain, capte également les pluies sur 200 m2. « En cumulant ces surfaces et quand il pleut 1 mm, nous remplissons la cuve de 2 m3 d’eau ». Sur cette partie du département, le cumul de pluies annuelles se situe aux environs de 860 mm en année sèche ; de quoi largement remplir la réserve : avec une surface de collecte de 2 150 m2, ce ne sont pas moins de 1 500 m3 d’eau qui tombent sur la toiture du hangar et sur les tri-tunnels.
Pour calculer les besoins en eaux pendant une saison complète, la maraîchère a fait la somme des consommations de chaque espèce cultivée, en réalisant des bilans hydriques qui prennent en compte les précipitations et l’évapotranspiration en plein champ et sous serre (voir encadré). « Nous démarrons l’été avec une réserve toujours pleine. Le bilan est négatif en juin, juillet et août, car l’ETP est la plus haute, mais les 650 m3 suffisent pour passer cette période ». Dans le calcul de récupération d’eau, la Finistérienne a considéré que 20 % des pluies sont perdues, par exemple par des débordements.
Une faible emprise sur le terrain
Cette cuve semi-enterrée a demandé un investissement de 16 000 €. Une subvention de FranceAgrimer à hauteur de 35 % est venue soulager la facture de cet ouvrage autoconstruit par les maraîchers. Avec un diamètre de 14 m et une hauteur de 4 m, « l’emprise sur le terrain est très faible », souligne Marianne Cahierre. Une lagune aurait eu la même efficacité en termes de capacité de stockage mais aurait mangé davantage de surface. Quand elle se remplit, la réserve stocke l’eau dans une membrane : la bâche du dessus flotte et évite ainsi l’évaporation naturelle et ne récupère pas les feuilles des arbres des alentours.
Maraîchage sur sol vivant
La ferme utilise beaucoup de paillage pour garder l’eau dans la terre et pour limiter le travail du sol. Avec une gamme large de 30 légumes différents, le pilotage des apports d’eau se fait différemment. « Nous utilisons le goutte-à-goutte de préférence en été par souci d’économie ; les asperseurs servent le reste de la saison. Les aubergines, les tomates et les poivrons sont les plus gourmands, nous les arrosons 2 à 3 fois par semaine ». Si le paillage est actuellement composé de paille, le Gaec va s’essayer l’année prochaine à du compost de déchets verts, qui « demande plus d’arrosage mais qui précocifie la récolte car le sol se réchauffe plus vite ».
Fanch Paranthoën
Une installation sur mesure
« Habituellement, nous collectons l’eau par gravité. Sur ce projet, on peut placer la cuve de récupération là où l’on veut, avec une bonne intégration paysagère », explique Ronald Rio, en charge de la conception pour l’entreprise OdysséeLab. L’armoire de surpression a été spécialement conçue pour la ferme. Pour alimenter la cuve, des canalisations en diamètre 63 mm ont été posées, avec une pompe capable de pousser 15 m3/h. Du côté du départ de l’eau vers les cultures et dans l’armoire technique, la pompe à variateur adapte le débit, mais la pression reste toujours la même (4,5 bars) pour un bon fonctionnement des asperseurs. Ce départ se fait en diamètre 50 mm. « Il n’y a pas de filtre à sable sur l’installation, seulement une filtration à disques, car les eaux sont finalement très peu chargées ».