Du prix, du prix. Et quoi d’autre ? Du prix. L’alimentaire ne s’en sort pas et ne s’en sortira pas de sitôt de cette obsession collective des consommateurs occidentaux à payer moins cher leur alimentation. Le fait est que 70 ans de baisse continue de la part consacrée au budget alimentaire par les ménages a fini par laminer, non seulement le prix du produit, mais aussi la valeur culturelle attribuée au contenu de l’assiette. Par ricochet, cette accessoirisation du culinaire a nourri le développement des plats transformés devenus concurrentiels grâce à la capacité des industriels à maîtriser les prix en remplaçant les ingrédients bruts par toutes sortes d’émulsifiants, colorants, exhausteurs de goût. Voire des arômes totalement artificiels comme ces combinaisons moléculaires qui imitent à la perfection le parfum de la truffe (Méfiez-vous pour Noël…).
Soyons malheureusement rassurés : le rapport de force ne risque pas d’être bousculé par la baisse de production agricole française, et particulièrement de l’élevage. Tout simplement parce que l’agroalimentaire et la distribution se tournent de plus en plus vers l’import qui offre des tarifs ultra-compétitifs pour répondre à l’impératif de prix bas. Cette voie d’approvisionnement qui se renforce à grands traits depuis quelques années douche à chaque fois l’espoir des agriculteurs qui comptaient sur la réduction de l’offre intérieure pour muscler les prix au départ de la ferme. Illusion… Les prix à la production sont de moins en moins sensibles au volume d’offre locale quand 50 % des volailles consommées en France sont importées, 25 % de l’emmental, 25 % de la viande bovine, 28 % des légumes et 70 % des fruits. Le rejet de l’accord du Mercorsur par les agriculteurs agrège de façon légitime toute cette frustration et cette impuissance à agir.