« L’origine de cette mission était le discours grandissant de dénigrement de l’élevage en France avec des attaques sur les émissions de gaz à effet de serre, la pollution de l’eau, les nuisances de l’élevage… Tout cela sans jamais rappeler les apports positifs de l’élevage », indique Dominique Chabanet, vétérinaire de métier et inspecteur général du CGAER. Il est intervenu le 6 décembre dernier à Ploufragan lors de l’assemblée générale de l’UGPVB pour présenter le rapport « alimentation et élevages : externalités positives » publié en juillet 2024. Il a rappelé qu’il ne fallait pas opposer les espèces ni les systèmes. Le rapport a été réalisé suite à un travail de consultation, d’étude bibliographique et de confrontations sur le terrain en Bretagne et en Occitanie.
Dominique Chabanet fait remarquer que l’élevage valorise énormément de coproduits. Une étude néerlandaise prouve que pour avoir une empreinte carbone optimum il faut intégrer de l’élevage.
« Il y a une notion de circularité et d’entretien des cycles. Le cycle de l’élevage est en lien avec celui du végétal et celui du sol. L’élevage permet aussi de produire des médicaments, de la fertilisation et aussi de l’énergie. L’élevage entretient le territoire : là où il n’y a pas d’élevage il y a de la forêt. La présence de ruminants sur certains secteurs est indispensable à la préservation des écosystèmes. L’élevage s’est développé aux endroits où il était difficile d’implanter des cultures pour nourrir les hommes. Le rapport salue la vitalité du territoire breton qui est unique en France. » L’inspecteur général met aussi en avant l’emploi direct et indirect généré par l’agriculture : 1 ETP (équivalent temps plein) agricole génère 1,25 ETP extra-agricole, 1 ETP en porc génère 6 ETP extra-agricoles.
Un manque de fibres dans notre alimentation
Le document fait le lien entre l’élevage, l’alimentation et la santé.
« Le problème n’est pas que l’on mange trop de viande mais plutôt le développement de la consommation de produits ultra-transformés. Niveau santé publique, cela serait mieux de communiquer sur le manque de fibres dans notre alimentation avant de dire qu’il faut réduire sa consommation de viande. Si nous mangeons plus de fibres, notre consommation de viande va se réduire par la force des choses. »
L’élevage est indispensable sur notre territoire
Marc Kérangueven, président de la Sica de Saint-Pol-de-Léon, a réagi à ce rapport du CGAER : « Il met en avant qu’il est important d’aller chercher un rééquilibrage alimentaire en mangeant plus de légumes. Nos productions légumières sont indissociables des activités d’élevage. J’ai des voisins éleveurs, je fais des échanges de terres avec eux, ils me fournissent de la matière organique. Tout cela fait que j’ai moins de pression sanitaire sur mes légumes prouvant que l’élevage est indispensable sur notre territoire. » Et Jean-Marie Séronie, agroéconomiste, de poursuivre : « Les 2 derniers exercices en production porcine ont été très bons. En viande bovine, les 2 dernières années ont été bien meilleures que celles d’avant. Il faut le dire pour donner envie aux jeunes de s’intéresser aux métiers de l’élevage. Demain, ces jeunes générations d’agriculteurs ne travailleront plus seules. Nous devons les encourager à s’installer sur des exploitations collectives. Cela permettra de se diversifier, d’avoir des compétences plus larges et surtout de gagner en qualité de vie. »
Pour Marc Keranguéven, il n’est plus possible que la profession agricole française soit critiquée. « Nous avons mis en place énormément de choses sur nos exploitations pour améliorer nos pratiques et être le plus vertueux possible. Le problème est que nous n’avons pas su communiquer pour le faire savoir et aujourd’hui il est temps de le faire. Nous sommes les premiers concernés par l’environnement car c’est notre outil de travail. »
Nicolas Goualan
Garder une structuration coopérative
Opinion -Michel Bloc’h, président de l’UGPVB
Ce qui est écrit dans ce rapport est ce que l’on prône depuis toujours à l’UGPVB. Ce rapport est sous-utilisé en ce moment, nous espérons qu’il ne finira pas aux oubliettes. Nous sommes à la croisée des chemins sur toutes nos productions animales. L’élevage breton a réussi à rester efficace grâce au collectif. Aujourd’hui, les jeunes qui sortent des écoles d’agriculture ont perdu cette notion et cette culture de la coopération. Nous ne sommes rien tout seuls, même le plus gros des élevages. L’avenir de nos productions animales passe par le collectif. La réalité qui se dessine dans la production porcine est un doublement des indépendants dans les 5 ans qui viennent. Il faut garder une structuration coopérative. Sur une carrière de 40 ou 45 ans, un éleveur aura des problèmes économiques, sanitaires, environnementaux. Seul le collectif lui permettra d’y faire face.