« Cela fait dix ans qu’on travaille sur l’attractivité de nos métiers, souligne Maët Le Lan, responsable de la station expérimentale en maraîchage d’Auray. En 2021, on a rencontré les concepteurs de cet enjambeur. Cela s’est fait sur un coin de table, ils avaient juste dessiné la machine sur un A4. On a trouvé l’idée intéressante tout en se disant : rendez-vous dans 10 ans… Mais dès l’été suivant, on testait le prototype à la station ! J’étais admirative du travail accompli. On leur a suggéré des améliorations… Au Sival 2023*, elles avaient toutes été prises en compte. »

Son point fort : la souplesse d’adaptation

Principalement dédiée au maraîchage diversifié en circuits courts, la station expérimentale d’Auray était l’endroit idéal pour essayer ce nouvel enjambeur : « La problématique en maraîchage, c’est la diversité des cultures. Or, les machines disponibles sont, le plus souvent, spécialisées sur une seule culture. Les producteurs ne peuvent pas toujours investir dans une telle gamme d’outils. Du coup, une grande partie des opérations culturales se font manuellement et sont, de fait, pénibles.

Réussite technique

Cet enjambeur, lui, a été pensé comme un assistant polyvalent qui aide à désherber, repiquer ou récolter. Véritable réussite technique, son point fort est sa souplesse d’adaptation. Les systèmes d’attelage des différents modules (lits de désherbages, sièges, dents de binage…) fonctionnent par emboîtement ou à l’aide de rotules favorisant une utilisation intuitive. Légers, ces modules sont faciles à interchanger. Le poste de conduite est confortable et l’engin se déplace trois fois plus vite que les machines existantes. Son dispositif de guidage est efficace et le boîtier de commande, aimanté, se fixe là où veut. Côté confort : on travaille à l’ombre des panneaux solaires, dans le silence et sans exposition à des gaz d’échappement. On peut même écouter la radio… De plus, l’autonomie en énergie est réelle. En 2024, même avec un été très gris, on n’a jamais eu à recharger sur secteur ».

Le juste prix

Mais quid de sa rentabilité ? « Certes, on peut choisir de travailler sans assistance, rappelle Maët Le Lan, tout en sachant que la main-d’œuvre se fait rare… Et si on en restait là, au regard de l’investissement, l’étude économique serait défavorable à l’enjambeur (quand bien même la suppression du chauffeur grâce au guidage permet des gains de temps). Mais quand on intègre le bien-être (pas de mal au dos en terminant sa journée, des saisonniers qui apprécient le travail allongé, ne sont pas dégoûtés du métier et reviennent la saison suivante…), une vraie question s’impose : quel est le coût réel de la pénibilité, d’un arrêt de travail, d’un saisonnier qui ne revient pas ? À long terme, c’est bien la pérennité de l’exploitation qui est en jeu. Le mieux, c’est encore de pouvoir tout prendre en compte avant d’investir : son budget, ses propres compétences, ses salariés, son parcellaire, ses cultures… Et justement notre rôle, c’est de conseiller les producteurs de façon neutre. Ils peuvent venir à la station, essayer nos machines et les tester au champ ».

Pierre-Yves Jouyaux

* Sival : Salon international des techniques de productions végétales.

Repères : Travaux de désherbage, de repiquage, récolte et de manutention ; Engin à 3 roues (roue avant directionnelle) ; Guidage assisté par caméra ; Traction électrique (recharge principale par panneaux solaires) ; Fourche à palette : jusqu’à 250 kg ; Extensions latérales possibles (pour couvrir 3 planches) ; Prix : de 35 000 à 40 000 € HT selon l’équipement retenu; Fabriqué à Saint-Malo ; Concepteurs : Basile et Felix Gaulier ; Contact : 07 65 69 01 79 ; Site internet : romanesco.fr

Contact : Station expérimentale en maraîchage d’Auray Chambre d’agriculture de Bretagne 02 97 46 30 80 – maet.lelan@bretagne.chambagri.fr

---