Pratiquer « l’agriculture intelligente »

Grâce à une gestion pointue de la nutrition des plantes, un suivi rigoureux des sols et des applications foliaires ciblées, Tim Parton parvient à réduire drastiquement l’usage des intrants tout en maintenant des rendements élevés. Une approche où biologie et observation remplacent progressivement la chimie.

Une photographie de mains d'un agriculteur plongées dans un sol agricole riche en biodiversité - Illustration Pratiquer « l’agriculture intelligente »
© DALL·E

Tim Parton gère une ferme de 300 hectares dans le Staffordshire, en Angleterre. Depuis plusieurs années, il œuvre pour l’agriculture régénérative. Dans son système, il limite considérablement l’usage des produits phytosanitaires et des engrais minéraux, préférant une approche axée sur la nutrition des plantes, l’utilisation de couverts végétaux, et la surveillance rigoureuse de la santé des sols. « J’utilise la biologie pour remplacer les fongicides », explique l’agriculteur. « L’usage de bacilles contre la rouille jaune ou la fusariose se révèle autant, voire plus efficace, tout en étant plus de 15 fois moins cher. » Sur l’exploitation, les rendements en blé atteignent les 100 quintaux, avec un coût de production d’environ 100 €/t. « À part le glyphosate, je n’utilise pas d’herbicide sur le blé. De plus, les apports d’azote au sol sont limités à 50 kg/ha car je privilégie des applications foliaires, plus facilement assimilables par les plantes. »

Le calcium est le roi

« Une attaque de ravageurs n’est jamais le fruit du hasard », affirme Tim Parton. « Il y a toujours une raison nutritive derrière tout ça. » Par exemple, l’apport de magnésium, de soufre, de molybdène, de bore et d’acides humiques sur du colza favorise la photosynthèse, et par conséquent la fabrication de sucres complexes. Ces derniers, indispensables pour la survie et la croissance de la plante, la rendent aussi moins sensibles aux ravageurs. L’agriculteur utilise également du silicate de potassium en application foliaire pour renforcer les feuilles. En outre, il emploie régulièrement du vinaigre de bois, ou acide pyroligneux. « Ce produit naturel a de nombreux atouts : amélioration de la germination, rôle fongicide, capacités dessiccantes ou encore stimulation du développement racinaire. » Enfin, le céréalier place le calcium sur le podium des éléments nutritifs. « Il facilite le transport de tous les autres éléments, et améliore la solidité des parois des cellules. » Tous les 10 à 15 jours, l’agriculteur effectue des analyses de sève pour ajuster précisément la nutrition de ses plantes. « Je considère mes cultures comme des athlètes de haut niveau », déclare-t-il. Généralement, les applications foliaires sont effectuées pendant la nuit, où la température est idéale et où les stomates sont ouverts. En raison du volume important d’eau utilisée pendant la pulvérisation (200 L par hectare), Tim Parton possède également un appareil pour dynamiser l’eau. « Selon moi, la nutrition peut venir à bout de tous les problèmes des plantes. »

Une boîte à outils de terrain

Tim Parton s’est constitué une boîte à outils lui permettant de mesurer en temps réel l’état de santé de ses cultures : pH-mètre, refractomètre ou encore N-tester. « Si le pH d’une plante est supérieur à 6,4, il y aura davantage d’attaques de ravageurs », souligne l’agriculteur. « S’il est au contraire inférieur à 6,4, le développement des maladies sera favorisé. » La mesure du degré Brix sur un végétal sert quant à lui à avoir des indications sur sa teneur en sucres. « Chez moi, il est compris entre 18 et 22, contre 7 en moyenne sur une ferme conventionnelle. » Enfin, le N-tester est utilisé pour mesurer l’azote contenu dans la plante. « Ces outils sont vendus par les fournisseurs d’azote », précise l’agriculture. « Il ne serait donc pas illogique de penser que les valeurs affichées soient sous-estimées. Souvent, c’est en réalité le magnésium qui est limitant pour l’assimilation de l’azote. »

Rouler la nuit

Sur la ferme de Brewood Park, les couverts sont composés d’au moins 6 espèces. Cette diversité favorise les enracinements à différentes profondeurs et représente une source d’alimentation variée pour les pollinisateurs. Pour les détruire, Tim Parton n’a recours au glyphosate uniquement quand les alternatives ne sont pas possibles. « Je préfère me lever à 3 h du matin pour rouler mes couverts par -4 °C. L’efficacité est de 90 à 95 %. ». L’agriculteur utilise un rouleau Faca à sections articulées pour bien suivre le sol. Les réglages sont faits de manière à avoir au moins 4 pincements par tige.

Alexis Jamet

Une biodiversité bien présente

La réduction des produits chimiques sur la ferme de Tim Parton a grandement amélioré la biodiversité. Un suivi entomologique y est d’ailleurs réalisé régulièrement. « Il avait commencé dans les bandes enherbées mais s’est poursuivi dans la parcelle car la personne en charge du suivi n’avait jamais vu une telle diversité dans un champ », raconte l’agriculteur. Brewood Park est également un endroit propice à l’observation d’oiseaux et de papillons, qui s’épanouissent dans cet environnement. L’usage des insecticides est en effet révolu sur l’exploitation depuis plus de six ans. Concernant les oiseaux, la ferme abrite notamment des alouettes des champs, des perdrix grises, des bécassines sourdes, des pics-verts, ou encore des grives litornes.


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