Guerre commerciale : L’agriculture en première ligne

Deux mois après sa réélection, Donald Trump relance une guerre commerciale d’une intensité encore plus marquée qu’en 2017.

Le drapeau américain et une barrières
L’UE exporte chaque année pour 38 milliards d’euros de produits agroalimentaires vers les États-Unis. | © hkama - stock.adobe.com

En annonçant de nouveaux droits de douane sur les importations agricoles, le président américain a semé la panique sur les marchés. Cette décision marque une nouvelle étape dans sa politique protectionniste et pousse ses partenaires économiques à la riposte.

Le 3 mars, via son réseau Truth Social, Trump a officialisé l’entrée en vigueur de taxes douanières sur les produits agricoles importés, effectives dès le 2 avril. Dans la foulée, les marchés agricoles ont subi une chute brutale : en dix jours, le maïs a perdu 11 % à la Bourse de Chicago, le blé 12 %, et le soja plus de 5 %. Une déstabilisation qui inquiète tant les agriculteurs que les investisseurs.

Une riposte immédiate de Pékin

Face à cette offensive américaine, la Chine a rapidement contre-attaqué. Dès le 10 mars, Pékin a instauré de nouveaux droits de douane sur des produits agricoles américains : le blé, le maïs et le coton sont désormais taxés à 15 %, tandis que le soja, la viande et les produits laitiers subissent une hausse de 10 %. Le ministère chinois des Finances a dénoncé une attaque contre le commerce multilatéral et une entrave aux échanges entre les deux puissances.

L’Europe, quant à elle, tarde à réagir. Déjà accaparé par la crise ukrainienne, l’exécutif européen semble hésitant. Toutefois, des mesures de rétorsion sont à l’étude. Le commissaire européen à l’Agriculture, Christophe Hansen, a évoqué la nécessité d’un filet de sécurité face aux pressions américaines, tandis qu’Emmanuel Macron n’a pas exclu la mise en place de contre-mesures ciblées.

Quelles options pour l’Europe ?

Si l’Union européenne devait réagir, plusieurs options s’offrent à elle. La première, et la plus diplomatique, consisterait à négocier avec Washington une exemption de ces taxes en échange de concessions, comme une augmentation des importations de gaz américain. Toutefois, cette approche ne fonctionnerait que si Trump adopte une posture purement transactionnelle.

Une autre possibilité serait de porter l’affaire devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Mais l’inefficacité de cet organe face aux entraves américaines et la lenteur des procédures en font une réponse peu convaincante. Enfin, l’UE pourrait appliquer des représailles commerciales, en utilisant par exemple l’instrument anti-coercition adopté en 2023. Cependant, ces mesures risquent de ne pas compenser les pertes des agriculteurs européens.

Des répercussions majeures

Selon une analyse de la Rabobank, ces tensions commerciales auront des effets bien au-delà des simples restrictions douanières. L’UE exporte chaque année pour 38 milliards d’euros de produits agroalimentaires vers les États-Unis, alors qu’elle n’importe que 14 milliards de produits américains. Cette dépendance accrue des États-Unis aux importations européennes pourrait donc compliquer la mise en œuvre des sanctions de Trump.

La filière des machines agricoles souffrira d’un accès restreint aux débouchés

Les produits alimentaires haut de gamme européens, plus difficiles à écouler sur d’autres marchés, seront particulièrement touchés.

La filière des machines agricoles, également dépendante du marché américain, souffrira d’un accès restreint aux débouchés.

Enfin, si les producteurs européens tentent de se tourner vers le soja sud-américain pour compenser, le règlement sur la déforestation prévu en 2025 limitera leurs options et pourrait faire grimper les coûts de production.

L’Europe devra ainsi rapidement définir une stratégie efficace face à cette nouvelle guerre commerciale qui, au-delà de l’agriculture, impacte l’ensemble de son écono- mie.

Agrapresse

L’OMC en renfort ?

Le Canada et la Chine, ciblés depuis le 4 mars par les surtaxes américaines, ont réagi en saisissant l’OMC dès le 5 mars. Ottawa a demandé l’ouverture de consultations avec Washington concernant ces mesures tarifaires. De son côté, Pékin juge ces restrictions contraires au GATT de 1994. Toutefois, ces recours ont peu de chances d’infléchir la position américaine.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article