Le loup ne fait pas couler que de l’encre

Lundi 17 mars, une quarantaine de personnes étaient au rendez-vous de la soirée Loup organisée à Kergrist-Moëlou par la Confédération paysanne des Côtes d’Armor. Les récentes attaques à Trémargat et Maël-Carhaix inquiètent. 

Trois hommes souriants - Illustration Le loup ne fait pas couler que de l’encre
Anthony Fiard, Léo Parrel (éleveur siégeant au Comité départemental Loup du Finistère) et Thomas Vernay sont intervenus à Kergrist-Moëlou. | © Toma Dagorn - journal Paysan Breton

De 2013 à 2019, Anthony Fiard a travaillé comme berger dans les Alpes. Là-bas, il a été confronté à la prédation et au loup. « Nous avons essayé beaucoup de choses pour le tenir à distance des animaux : mettre des petites lampes, uriner un peu partout, laisser la radio en marche… Mais le loup s’adapte à tout », raconte l’éleveur. « Un groupe de loups peut s’organiser pour leurrer les chiens : l’un d’eux fait diversion pendant que les autres attaquent le troupeau, y compris pendant les déplacements. » Selon lui, rien ne marche à 100 %, il faut donc cumuler les moyens de protection, dont le chien, pour limiter les pertes quand le grand canidé sauvage est présent.

Une empreinte de loup.
Les empreintes dans la boue, comme les crottes ou les poils, sont des indices précieux pour suivre la dispersion du loup.

Sept brebis attaquées fin février

Après son expérience dans le Sud-Est, Anthony Fiard est venu travailler en Bretagne. « Ici, j’ai trouvé un territoire avec de l’herbe et sans loup », raconte celui qui s’est installé en 2021 à Trémargat. Sur 40 ha de SAU, en système semi-plein air, il y conduit un cheptel de 300 brebis croisées viande et possède cinq chiens de protection. Vu son parcours, il est un des éleveurs les plus préparés en Bretagne. Fin février, il a pourtant subi une visite du loup. « J’avais un chien Montagne des Pyrénées parmi les 70 brebis gestantes clôturées, malheureusement il était attaché… Sept brebis ont été attaquées, toutes prises à la gorge. Quatre sont mortes. Il y aura peut-être aussi des dégâts au moment de l’agnelage en avril… »

Le loup s’adapte à tout

Aider à l’accueil d’un chien de protection

Anthony est l’un des trois relais locaux du réseau technique Idele chien de protection en Bretagne. « J’interviens chez les éleveurs pour aider à éduquer le chien qui doit se comporter comme une chèvre, une brebis ou une vache et l’intégrer dans le troupeau qu’il considère comme sa famille. » Tout commence par deux jours de formation collective notamment sur l’accueil du chiot et l’utilisation d’un chien de protection. Le suivi individuel est organisé en cinq visites sur la ferme la première année. « Mon premier passage intervient avant l’arrivée du chiot. Je repasse ensuite à la mise à l’herbe par exemple. » Comme pour l’installation de clôture ou de filets, l’éleveur avance les frais mais le coût financier de ce dispositif est aujourd’hui pris en charge (le dossier de demande d’aide doit être rempli en amont) dans le cadre du Plan loup pour les élevages ovins et caprins comptant plus de 25 animaux reproducteurs. « Mais pas pour les éleveurs de bovins et d’équins. » Le réseau Idele essaie également de mettre en place une filière nationale de chiens de qualité pour orienter les acheteurs lors du choix d’un chiot. Les relais peuvent aussi intervenir auprès des élus locaux pour expliquer les bonnes pratiques à adopter par les usagers en présence de chiens de protection.

Toma Dagorn

En savoir plus sur le chien de protection

Pour les gens qui se questionnent sur le chien de protection, Idele propose des ressources documentaires en accès libre. Anthony Fiard invite à regarder sur YouTube le film « Bascou & nous » et à parcourir le site internet www.idele.fr/chiens-de-troupeau (rubrique Chiens de protection) qui répertorie les interlocuteurs du réseau sur chaque département, annoncent les dates de formation, proposent des guides à lire ou télécharger (rubriques Les conseils techniques)…

Prédation chez 1 600 éleveurs

Espèce au statut strictement protégé, les chiffres officiels de l’OFB parlent d’un millier de loups pour environ 200 meutes en France aujourd’hui. « Son développement est assez linéaire : sa population double en gros tous les cinq ans », précise Thomas Vernay, animateur national chargé du dossier Grands prédateurs à la Confédération paysanne. « Dans le Sud-Est, il y a une forme de saturation du territoire et le loup se disperse, notamment vers l’Ouest. » En 2024, on a relevé 4 000 attaques concernant 1 600 éleveurs pour, à l’arrivée, 12 000 victimes (dont des bovins et équins) finalement classées « loup non exclu » par l’Administration. « Ce bilan de la prédation montre une explosion de l’espace géographique concerné. » S’il se nourrit surtout de faune sauvage, le loup, opportuniste, va au plus simple, « aussi la mise en place de moyens de protection est importante ». Dans le cadre du Plan loup, les aides aux éleveurs couvrant les dépenses liées à la protection (chien, clôtures, main-d’œuvre…) dépendent du classement des communes par arrêté préfectoral (cercle 0 à 3). « S’il est important de tirer un loup qui s’est installé sur un troupeau (sur autorisation préfectorale), l’animal reste difficile à tuer. En 2023, plus de loups sont morts dans des accidents de la route que par des tirs de défense. »


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