Le père du métro parisien est breton

Ingénieur visionnaire et infatigable, Fulgence Bienvenüe est l’homme derrière le métro parisien. À la fin du XIXe siècle, alors que Paris suffoque sous l’afflux de piétons, de fiacres et d’omnibus, il orchestre un chantier titanesque pour doter la capitale d’un réseau souterrain moderne.

Fulgence Bienvenue - Illustration Le père du métro parisien est breton
Fulgence Bienvenüe 
devant la station Monceau 
en février 1920. | © © Collection RATP

Fulgence Bienvenüe voit le jour en 1852 à Uzel, dans les Côtes-d’Armor. Très brillant, il obtient son baccalauréat à l’âge de 15 ans. En 1870, il intègre l’École polytechnique avant d’être nommé ingénieur des Ponts et Chaussées cinq ans plus tard. Le jeune ingénieur commence sa carrière en Normandie, à Alençon, où il se consacre à l’amélioration du système ferroviaire régional. Il participe notamment à la construction des lignes reliant Fougères à Vire, et Alençon et Domfront. Son investissement est d’ailleurs récompensé par la Légion d’honneur en 1981. Affecté à Paris en 1884, il y laisse aussi son empreinte en aménageant le parc des Buttes-Chaumont, en supervisant la création du tramway funiculaire de Belleville et en modernisant les égouts des quartiers populaires.

Une course contre la montre

L’histoire du métro parisien commence au milieu du XIXe siècle. À cette époque, Paris est confronté à une urbanisation galopante et à une circulation chaotique. Des solutions sont imaginées pour fluidifier ce trafic. Alors que plusieurs projets sont envisagés, l’Exposition universelle et les Jeux Olympiques de 1900 accélèrent la décision : la ville opte pour un métro souterrain à voie étroite et à traction électrique. Les travaux débutent le 4 octobre 1898 sous la direction de Fulgence Bienvenüe. Le défi est colossal : en un an et demi, il faut construire la première ligne reliant la porte Maillot à la porte de Vincennes, soit 18 stations et environ 10 kilomètres de galeries souterraines. Malgré un retard de trois mois, le chantier est mené tambour battant et la ligne voit le jour en un temps record de 20 mois.

Un exploit de génie civil

La construction de la première ligne s’articule autour de plusieurs chantiers à ciel ouvert et repose sur la technique des tranchées couvertes. Des fossés sont creusés quelques mètres sous la chaussée et sont recouverts d’un toit. À l’époque, le béton armé n’existe pas encore ; la maçonnerie est donc privilégiée, tandis que d’imposantes charpentes métalliques soutiennent la couverture du tunnel, située à seulement 1,25 mètre sous la surface. Les quais, quant à eux, se trouvent à 6 mètres de profondeur.

Le chantier se poursuit en souterrain, dans une ambiance digne de Germinal

Mais dans une ville dense comme Paris, il est impossible d’effectuer tous les travaux à ciel ouvert. Le chantier se poursuit alors en souterrain, dans une ambiance digne de Germinal. Les mineurs y travaillent sans relâche à coups de pioche et de pelle, utilisant la méthode dite des galeries boisées. Pas moins de 350 000 m3 de déblais sont évacués par des chariots poussés à la main et remontés à la surface grâce à des puits.

Les dix années suivantes sont consacrées à la construction des lignes 2, 3, 4, 5 et 6. Certaines d’entre elles traversent la Seine et nécessitent alors des techniques de génie civil inédites. Parmi elles, on retrouve par exemple la congélation de sol avec de la saumure gelée à -24 °C, et l’utilisation de caissons métalliques immergés formant les tronçons du souterrain.

Fulgence Bienvenüe prend sa retraite à l’âge de 80 ans, après avoir travaillé sur la construction de toutes les lignes, à l’exception de la 14. En 1933, la station « Maine » de la ligne 14 est rebaptisée « Montparnasse Bienvenüe » en son honneur. Le père du métro parisien s’éteint en août 1936, laissant derrière lui un héritage durable.

Montparnasse : un quartier breton

L’histoire bretonne de Montparnasse débute en 1865 avec l’ouverture de la ligne de train Brest-Paris. Espérant fuir la misère, de nombreux Bretons gagnent alors la capitale. Surnommés « les Parias », ils se voient confier les travaux les plus pénibles, et notamment le creusement des tunnels du métro. Les femmes, quant à elles, travaillent comme nourrices, concierges ou prostituées dans les quartiers prolétaires. Les Bretons sont également ciblés par des journaux satiriques et sont pointés du doigt par les Parisiens qui leur reprochent de voler leurs emplois. L’histoire se répète, mais les minorités changent. Au fil des années, les Bretons s’affirment dans le paysage en créant de nombreuses associations, et en ouvrant les premières crêperies. Aujourd’hui, autour de la gare, on trouve encore de nombreuses références bretonnes, dans les commerces bien sûr, mais également dans la culture populaire. Dans son roman Pars vite et reviens tard, Fred Vargas met en scène Joss Le Guern, un ancien marin du Guilvinec devenu crieur public sur la place Edgar Quinet, perpétuant ainsi le lien indéfectible entre Paris et la Bretagne.

Alexis Jamet


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article