Dossier technique

Une course contre la montre pour des primeurs de qualité

EARL de Ponthebart, Paimpol (22) - Un tiers de la sole de l’exploitation est consacré aux pommes de terre. Une culture technique dans la rotation qui demande une préparation du sol précise pour des légumes de consommation primeurs.

Planteuse de pomme de terre dans un champ - Illustration Une course contre la montre pour des primeurs de qualité
Le tracteur de la planteuse est équipé de roues jumelées. | © Paysan Breton – F. Paranthoën

Sur les 150 ha de SAU que compte la ferme familiale d’Alexandre Jacob, 50 sont consacrés à la production de pommes de terre de consommation. L’exploitation compte aussi des céréales d’hiver et de printemps pour allonger la rotation, et des serres pour des cultures sous abri qui profitent également à la solanacée : de la Primaline est plantée entre début décembre et début janvier.

Dans cette partie des Côtes-d’Armor proche du littoral, il ne gèle quasiment jamais. Ces conditions météorologiques autorisent des plantations très précoces pour des récoltes effectuées tôt dans la saison. Le producteur est associé avec son frère Romain et sa mère Gwénola, 130 ha de l’exploitation sont irrigables. « J’aime cette culture, c’est très technique », apprécie l’agriculteur, sur un chantier de plantation de la mi-mars.

5 à 6 jours de gagnés sur la date de récolte avec des plants germés

Depuis 3 ans, l’itinéraire technique a changé : auparavant, les terres étaient labourées puis recevaient 2 passages de herse rotative. La planteuse officiait enfin dans les champs, sans formation de buttes au préalable. Désormais, l’EARL a investi dans un enfouisseur à pierre, car « la moitié des champs sont caillouteux ». Après un labour et un coup de herse, le Rotostone de chez Massano positionne la terre fine sur le dessus, les éventuelles pierres en dessous, et forme une butte. Cette machine fonctionne grâce à un rotor porte-lames qui tourne dans le sens inverse de l’avancement du tracteur et qui projette la matière contre une grille de sélection. En amont, un Actisol travaille la terre entre 25 et 30 cm de profondeur avec une rangée de dents avant que les buttes ne soient formées, pour favoriser l’enracinement. Viennent dans la foulée la planteuse et la butteuse, puis une bâche biodégradable recouvre la terre sur les premières pommes de terre plantées. « On gagne ainsi une dizaine de jours de précocité ». Cet itinéraire technique favorise le réchauffement de la terre, soit un meilleur potentiel des parcelles. « Cela se voit sur l’irrigation, qui est diminuée. Le fait de décompacter offre une meilleure pénétration des racines ».

Préserver les sols

« Dans cette période printanière, la terre est fraîche. Il faut éviter au maximum les tassements de sol. Grâce au télégonflage, la pression des pneumatiques est ajustée ». Cette pression est de 0,8 bar pour les roues arrière, de 0,6 bar pour celles de l’avant. Le tracteur qui traîne la planteuse est équipé de roues jumelées.

La formation de billons sert à « réchauffer plus rapidement les sols et à les faire sécher. Le travail de la planteuse est facilité ». Si la saison le permet, Alexandre Jacob plante dès le 15 janvier. « Nous n’avons rien tamisé cette année, il n’y a pas eu 10 jours consécutifs de beau temps » remarquait-il à la mi-mars. Les terres caillouteuses bénéficient du passage du Rotostone. La récolte est facilitée par une arracheuse de type Airsep du constructeur Grimme, capable de récolter dans des sols non-tamisés. Aussi, cette machine « nous fait économiser de la main-d’œuvre : là où il fallait 9 personnes le jour de la récolte, le chantier peut très bien se dérouler à 4 opérateurs aujourd’hui. Elle est capable d’arracher 30 t en 1,5 heure ».

Vigilance sur le pH

La ferme familiale cultive 4 artichauts différents, des betteraves, de la carotte et des choux-fleurs en plus des pommes de terre. « Ici, on a toujours quelque chose à récolter, du 1er janvier au 31 décembre ». Une gestion très technique, chaque espèce demandant un pH approprié pour croître. « Le chou aime les sols neutres (pH 7), les pommes de terre préfèrent un pH autour de 6,5 ». De par ces nombreuses cultures légumières, les terres sont très souvent travaillées, que ce soit par de la préparation de sol ou par du binage. « Les primeurs ont besoin de terre fine, mais pas les choux-fleurs qui risquent de développer de la hernie », donne le producteur en exemple de défi technique. Le profil « est souvent soufflé, ce qui favorise l’apparition de gale ». Aussi et sur les Primalines cultivées sous abri, le couvert végétal composé d’un sorgho qui apporte beaucoup de biomasse fraîche « est broyé finement avant plantation, pour ne pas avoir d’agrégats dans les buttes et favoriser encore une fois la gale ». Ce couvert est implanté au semoir à céréales. Pour la partie plein champ, une dizaine d’espèces est utilisée en couverture, « bien souvent en couvert d’automne. Je sème après moisson de la féverole, de l’avoine, des radis chinois, du lin, des trèfles, des tournesols, du sarrasin, ou du fenugrec ». Pour lutter contre les taupins, le labour est systématique. Ces vers ravageurs « se retrouvent à l’air libre, ils sont facilement consommés par les oiseaux ».

Faire germer ses plants pour plus de robustesse

En reproduisant la même technique que ses ancêtres, Alexandre Jacob met ses plants à germer avant de les planter. Le jeune agriculteur reprend ce procédé, « comme le faisait mon grand-père. On gagne 5 à 6 jours sur la date de récolte, c’est amplifié si le printemps est froid et humide. Les plants sont beaucoup plus robustes ». 90 % des plants de la ferme sont ainsi préparés. L’opération consiste à stocker sous serre plastique pour une température adéquate et pour un effet de la lumière optimum les plants en clayettes ajourées de 17 kg pour éviter les phénomènes de transpiration. « Comme il y a une circulation de l’air, les pommes de terre ne racinent pas ». Le légumier estime que le bon stade est atteint quand les germes mesurent 1 cm de long. « C’est à ce moment qu’ils sont les plus robustes, ils ne se casseront pas quand on les chargera dans la planteuse ». Alexandre Jacob prend soin de ses plants, surtout « avec un coût à l’hectare qui a explosé : on est passé de 1 500 € à 3 000 € en quelques années ». Sur ce chantier de plantation de mi-mars, la récolte sera effectuée à la mi-juin.

Fanch Paranthoën

Repères : 3 associés, Alexandre, Romain et Gwénola Jacob ; 150 ha de SAU ; 130 ha irrigables ; 50 ha de pomme de terre de consommation.

Un effet du chaud sur les variétés nerveuses

Alexandre Jacob remarque qu’avec « des températures de plus en plus chaudes, les pommes de terre font leur cycle de plus en plus vite. Certaines variétés germent rapidement et se ramollissent vite une fois arrachées. Récolter précocement doit être une adéquation entre son sol, la qualité de la pomme de terre et le débit de chantier ». Certaines variétés, « très nerveuses comme Jazzy, germent rapidement après récolte ». C’est pourquoi elle est très adaptée au créneau primeur.


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